Si ‘The Godfather’ parvient à se démarquer des nombreux autres films de gangsters américains, c’est peut-être par le point de vue original du milieu qu’il apporte. En effet, le récit se désintéresse complètement de toutes les activités illégales auxquelles se livre la mafia en Amérique. Certes, il est fait mention de casinos, de prostitution, puis de trafic de drogue, mais on ne voit jamais ces délits à l’écran. ‘The Godfather’ se concentre uniquement sur les jeux de pouvoir à grande échelle auxquels se consacrent les chefs de famille, et au règlement de compte qui s’opèrent entre eux.

A cela s’ajoute l’accent que l’œuvre met sur l’importance de la famille chez les Corleone. L’introduction pendant les festivités d’un mariage, la générosité du Don, et l’amour familial qui va unir les Corleone pendant le film donne également une certaine carure à l’intrigue qui va se jouer. Trahison, meurtres, vengeances et négociations sont donc de mise, et on notera d’ailleurs que la série ‘Game of Thrones’ repose en partie sur les mêmes thèmes. Du coup, le scénario est excellent, et le film est plutôt bien rythmé.

En outre, et c’est sûrement là son meilleur argument, ‘The Godfather’ met en scène la formidable évolution d’un personnage marquant. Al Pacino joue en effet l’ascension dans le monde du crime de Michael Corleone, non sans rappeler son futur rôle dans ‘Scarface’. Là où le film est particulièrement brillant, c’est dans la subtilité de la métamorphose de son personnage. Jeune homme innocent au début de l’œuvre, il finit à la tête d’un empire mafieux, et jamais on ne s’offusque des décisions qu’il a prises.

On regrettera tout de même quelques ellipses narratives contrariantes. Entre autre, on sursaute lorsque Mickael apprend à Key (et au spectateur) qu’il est de retour en Amérique depuis 1 an et demi et qu’il a repris les activités de son père. Dans le même esprit, on s’étonnera qu’après la mort de Sonny, personne ne semble reprocher quoi que ce soit à Carlo.

Au niveau de la réalisation, on aura du mal à redire au travail de Francis Ford Coppola. Certains effets spéciaux ont vieillis (le sang pas forcément réaliste, la mort exagérée de Sonny), mais la narration est claire, et la mise en scène parvient à créer une certaine tension sur les passages clés du récit (l’hôpital désert, la mort de Vito). D’ailleurs, le final, faisant écho au titre de l’œuvre, est prodigieux, avec son montage insensible. On n’oubliera pas non plus une bande-originale formidable, avec son thème culte.

C’est pourtant le casting de l’œuvre qui fait de ‘The Godfather’ un grand film. Marlon Brando, méconnaissable et génialissime interprète une icône du cinéma, tandis que Al Pacino, James Caan (Sonny Corleone) et Robert Duval (Tom Hagen) forme une fratrie mémorable. Les rôles féminins sont plus anecdotiques, mais l’exquise Simonetta Stefanelli en charmera plus d’un.

Un monument du cinéma.

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le 11 mai 2014

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Kroakkroqgar

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