sept 2010:

Ah les goonies! Toute une histoire très personnelle! Et j'imagine sans peine que ce film ô combien générationnel a dû imposer bien des rêves à ceux qui l'ont découvert à l'époque.

En le revoyant ces jours-ci, les manipulations émotionnelles propres aux films hollywoodiens made in Spielberg destinés à la jeunesse américaine semblent très nettement visibles, bien plus qu'au moment où je l'ai vu en salle alors que mon sens critique était aussi aiguisé que celui d'une grenouille de bénitier. Je pense à cela sûrement du fait que la fin orchestre de manière assez brouillonne et grossière les émotions primaires du spectateur à coups de musique larmoyante et grâce un timing incroyablement allongé afin de pousser le suspense et l'excitation à leur comble. Maladroite, cette fin ne doit pas faire omettre la très bonne tenue du scénario jusque là.

Les scénaristes Chris Columbus et Steven Spielberg ont compilé tous les ingrédients favoris de la pré-adolescence des années 1980 susceptibles d'en mettre plein les mirettes et de susciter divers fantasmes chez le jeune public. En effet, l'univers proposé est assez familier et confortable. Surtout tout le panel sociétal américain est à peu près représenté. La bande des Goonies est si multiforme qu'elle accueille en son sein un frêle asthmatique, un sportif, un obèse, un geek asiatique, un comique à l'humour noir et corrosif, une pompom girl et sa binoclarde BFF. Son cosmopolitisme militant s'adjoint le bras musclé d'un monstre au faciès à la Toxic Avenger qui se prend pour Errol Flynn. Accepter l'autre et ses différences est un discours certes convenu et convenable mais je ne suis pas sûr qu'il soit si commun finalement dans les films d'entertainment pour ados. En tout cas il est bienvenu ici, il n'est pas assené lourdement mais implicite.

Et puis les gamins sont sympathiques, l'histoire rigolote. Le scénario est très bien foutu avec une chasse au trésor en fil rouge. A cette fantasmagorie du monde de pirates vient s'ajouter celle de Jules Verne et son "Voyage au centre de la terre". L'aventure souterraine débouche sur une sorte de périple initiatique où les enfants se découvrent des ressources morales, des ambitions grandissantes et des habiletés à rouler les pelles.

Sous le grain de la fantaisie et l'amusement se cache l'ivraie de l'expérience adolescente avec tous des difficiles basculements à accepter, ces violentes perturbations à supporter. Le monde de l'enfance et ses bisounours se doit d'affronter la cruelle réalité, celle qu'incarne la famille Fratelli, criminelle, égoïste et cupide, dégénérée afin d'entrer de plain-pied dans le monde des adultes, celui de l'argent, de la sexualité et des responsabilités. Les ennemis aiguillonnent, servent de moteurs autrement plus puissants que le trésor. Les enfants sont en quête d'eux mêmes. Le film nous laisse l'apercevoir de façon assez juste.

Sur un rythme qui maitrise parfaitement temps forts et temps faibles, action et respiration, le récit n'est jamais ennuyeux, ménageant de grands moments de suspense tout en maintenant une bonne dose d'humour dans les situations comme les dialogues. Pas étonnant puisque Richard Donner est aux manettes, un réalisateur à la filmographie souvent joyeuse et pas aussi conne qu'elle en a l'air mais surtout un type qui sait faire tirer le meilleur parti de ses comédiens et de son scénario, un grand artisan, un manieur.

Un très bon film pour les enfants qui rêvent de pirates, de monstres, de trésor, de poursuites échevelées, mais qui se laissent confusément gagner par les premiers émois que provoque le sexe opposé.
Alligator
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le 14 avr. 2013

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Alligator

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