Ancien flic probablement traumatisé par la dureté du métier, Olivier Marchal est devenu réalisateur pour renouer avec une vision romantique de la police et pour exorciser ses vieux démons. Doté d'un talent de metteur en scène certain et excellent directeur d'acteur, le bonhomme s'est imposé avec 36 et Mr-73 comme LE spécialiste du polar à la française. De fait, cette étiquette en faisait logiquement un des candidats les plus crédibles (le seul ?) pour la réalisation du grand film de gangster que le cinéma français attend depuis des lustres (qu'on ne me parle pas de Mesrines....)
Librement adapté du livre d'Edmond Vidal, leader du gang éponyme, les Lyonnais fait le pari risqué de la grande fresque se déroulant sur plusieurs époques : a l'arrivée ? Une réussite que l'on relativisera malheureusement, la faute à un scénario frustrant.
Olivier Marchal a fait le choix de livrer un film compact parsemé de nombreux flashbacks ou chaque époque éclaire l'autre. Si le métrage reste cohérent, on regrette qu'il ne fasse que survoler certains moments clés (la naissance de l'amitié entre Edmond Vidal et Serge Suttel, l'âge d'or des Lyonnais, les années de prison, etc.) ce qui l'empêche de se ranger parmi les grandes sagas criminelles comme Romanzo Criminale.
C'est d'autant plus dommage que Marchal a réussi à éviter tous les pièges dans lesquels il était susceptible de tomber : le syndrome « Truand » de la caricature outrancière du milieu, les références prestigieuses trop envahissantes (même si la scène du repas rappelle inévitablement le Parrain), etc.
Le film est transcendé par une mise en scène solaire (la majeure partie de l'action se déroule de jour et la photo privilégie les couleurs chaudes) qui marque une rupture bienvenue avec la sinistrose habituelle des œuvres marchalienne mais aussi et surtout par des interprètes géniaux. En tête, Gerard Lanvin trouve tout simplement son meilleur rôle tant il est exceptionnel en voyou à l'ancienne. Visage marqué, silhouette massive...il irradie littéralement la pellicule et s'impose comme le plus beau personnage de gangster français qu'on ait vu depuis l'époque des Delon et Ventura ! Le reste du casting, tout en gueule, n'est pas en reste : de Tchèky Karyo toujours à l'aise en beau salaud, au très charismatique Daniel Duval en passant par la découverte Lionel Astier, ils sont tous formidables y compris les rares interprètes féminines (moins mises en avant que dans les précédents films du réalisateur) et les jeunes acteurs qui interprètes les Lyonnais jeunes (dans le rôle de Vidal jeune, Dimitri Storoge est une révélation).
Cette distribution impeccable est servie par des dialogues de haut vol (Marchal est le seul scénariste français qui parvient à écrire des dialogues en argot sans tomber dans le ridicule : Respect !), par un scénario qui recycle habilement des ficelles pourtant bien connues (en gros : amitié, trahison, honneur de malfrat, etc.) et par une construction narrative pertinente mais encore fois pas assez fouillée.
Au final, les Lyonnais aurait mérité de durer une bonne demi-heure de plus tant l'histoire s'avère romanesque en diable et les personnages fascinants et on ne désespère pas de découvrir un jour le director's cut qui dure paraît-il près de trois heures. Cependant, le métrage fonctionne parfaitement grâce à une maîtrise indéniables des codes du film mafieux et à des acteurs grandioses qui permettent aux Lyonnais de s'imposer sans difficulté comme une des références françaises dans son genre.
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