Sixième film d’Alfred Hitchcock (pas encore « sir » mais déjà un obsessionnel de 26 ans), « The Lodger » reste un petit miracle que le futur réalisateur de Psychose qualifiera de premier vrai film de son œuvre imposante (en quantité et en qualité). Un petit miracle, puisque le film failli ne jamais sortir, les producteurs déçus du résultat envisagèrent même la poubelle du coin, ce qui poussa l’un d’eux, Michael Balcon, à engager Ivor Montagu (futur producteur des « 39 Marches » et de « Agent Secret ») pour retravailler le montage, sauvant le film et accessoirement la carrière du jeune réalisateur (comme quoi). Ensuite, parce qu’inspiré de la macabre histoire de Jack l’Éventreur, le film joue sur la redoutable mécanique hitchcockienne de l’effroi. En quelques plans fixes, Hitchcock impose déjà son style et commence une plongée liminaire dans ses propres (ou sales, c’est selon) obsessions (érotisme de la chevelure blonde, culpabilité etc.) Le film, d’une grande efficacité, est une petite merveille visuelle (ha, cette maison et cet escalier nous séparant du possible coupable) baignée par le style expressionniste à la mode allemande. Le fait que le cinéaste anglais se soit formé un temps auprès de Murnau (Nosferatu, Faust, L’Aurore) explique probablement cela.