Le dernier film de Wes Anderson ne déçoit pas.
Ancré dans les années 1960, le ton est donné dès les premières minutes, avec des images très travaillées, certains plans ressemblant plus à un cartoon, notamment lorsque l'on voit pour la première fois la ferme habitée par Bill Murray et sa famille. Un homme chaudement habillé viendra ensuite introduire l'histoire, en présentant le cadre de l'action : année 1965, sur une petite île au large des Etats-Unis. Tout de suite, avec l'intervention de ce présentateur d'un autre temps, dans un typique style documentaire, on se rend compte que nous ne sommes pas face à un film ordinaire. Nous retrouvons ici tout le style décalé propre à Anderson, qui pose lentement son action, produit des dialogues pas forcément mémorables mais dont la forme pousse à sourire, et nous rappelle parfois la mise en scène de The Darjeeling Limited. On retrouvera d'ailleurs un acteur récurrent dans ces deux films, en la personne de Jason Schwartzmann, dans un rôle dans lequel on ne l'attend pas.
Le film met sur le devant de la scène deux enfants d'environ 12 ans, un garçon, orphelin, scout, sujet a de nombreux problèmes avec ses familles d'accueils, Sam, et une fille, dépressive, ennuyée, et qui cherche à s'évader d'une situation familiale inconfortable, Suzy. Les deux, après une rencontre fortuite, vont correspondre pendant près d'un an avant de s'enfuir tous les deux, le premier de son camp scout, la seconde de chez elle, et vont vivre une belle aventure, les menant sur les premiers pas de l'amour, tout en essayant de fuir leurs poursuivants, c'est-à-dire les scouts et leur chef, Edward Norton, le chef de police local, joué par Bruce Willis, les parents de la jeune Suzy interprétés par Bill Murray et Frances McDormand, ou encore la représentante des services sociaux, Tilda Swinton. En effet, si Moonrise Kingdom est d'abord centré sur les deux jeunes fugueurs, qui livrent une prestation étonnante de justesse, on remarque la présence d'un casting de haut-vol concernant les adultes, avec la présence à la limite du caméo de Harvey Keitel.
En somme, nous avons une belle histoire, deux enfants à problèmes qui désirent déserter leurs difficultés, et se retrouver seuls pour manifester leur amour réciproque, seule arme pour se défendre contre les événements extérieurs.
On verra d'ailleurs, lorsqu'ils se feront attraper une première fois, pour faire face a leurs opposants, leur réaction instinctive première est de se serrer l'un l'autre très fort, ainsi ils peuvent tout surmonter.
Les personnages sont tous très attachants, tout d'abord les enfants, qui nous font penser dans une certaine mesure aux personnages du film d'animation Pixar "La-Haut". En effet, impossible en voyant le jeune Sam de ne pas penser au petit scout Russel, dont l'uniforme scout est rempli de badges, et qui a toujours une solution pour survivre et s'adapter dans la forêt. De plus, la relation Sam-Suzy peut également rappeler la relation entre Carl Fredricksen et sa femme lors de l'introduction du film d'animation (intro géniale d'ailleurs). Les personnages sont somme toute assez stéréotypés, Suzy la jeune fille dépressive cherchant à s'évader de son quotidien ennuyant en regardant l'horizon à travers ses jumelles, Bruce Willis le solitaire, le loner, qui a vécu mais qui sous ses airs rustres abrite un coeur tendre et généreux, et le couple dysfonctionnel d'intellos qui ne se supporte plus et qui s'ennuie avec Bill Murray et
Frances McDormand (duo d'acteurs genial by the way). Tilda Swinton, sous son visage de rapace froid, personnifie à elle seule les services sociaux, service effrayant qui n'est pas à sa première mauvaise représentation dans la cinématographie américaine. Faudrait vraiment qu'ils pensent à faire quelque chose de ce coté là.
Bref, je ne saurais que recommander ce film, pas forcément la pellicule de l'année, mais on passe un moment plaisant, dans l'imaginaire décalé traditionnel d'Anderson, nous transportant à l'intérieur d'une poésie pleine de couleurs et de musique rétro.