Moonrise Kingdom par Missbale974
Moonrise Kingdom c’est un OVNI cinématographique,c’est le genre de film avec un cachet à part qui se fait rare de nos jours hélas.Je l’ai trouvé frais,acidulé,kitch mais dans le bon sens du terme.Je n’arrive pas à comprendre comment il a pu repartir bredouille du Festival de Cannes et des Oscars.Il a été 17 fois nominés sans aucune récompense mais heureusement que le public n’est pas aussi dupe que la presse et les jurys.Tout y est et ce,dés le commencement du film.L’introduction est originale puisque le générique défile et dans un même temps,le spectateur visite la maison des Bishop.Cette ouverture annonce déjà l’ambiance et l’univers particulièrement « déjantés » du film.
Le casting est en un mot parfait avec en autre un Edward Norton qui nous avait beaucoup trop manqué.Et,un Bruce Willis « chevelu » à des années lumière de John McClane mais toujours en flic.Néanmoins,la vraie révélation ici est le couple Suzy et Sam,deux enfants qui décident de prendre la fuite pour vivre ensemble.Ces personnages sont incarnés respectivement par Kara Hayward et Jared Gilman jusqu’ici inconnus du grand écran.Mais,ils ne risquent pas de le rester bien longtemps vu la performance qu’ils livrent tous deux dans ce film.La relève est assurée et c’est le moins que l’on puisse dire.En effet,les deux enfants sont débordants d’émotion,de justesse et de finesse.Et aussi,de naïveté et de maturité à la fois.D’un côté,nous avons Suzy qui adore lire.La jeune fille souffre de l’indifférence de ses parents et voudrait une vie bien à elle.De l’autre côté,nous avons Sam ce petit garçon adopté et mal aimé qui décide de tout fuir pour aller vers des auspices meilleurs avec sa bien aimée,Suzy.
A travers leurs personnages,Wes Anderson livre un bel hommage,un hymne à l’enfance,à cet âge où on croit que tout est possible.Un âge où on a peur mais on ose quant même car on ne connait pas encore la crainte de l’échec ni la crainte d’avoir mal.Un âge où on est plus un enfant ni encore un adolescent c’est juste un entre-deux,une transition.Suzie et Sam veulent vivre leur histoire d’amour au grand jour,loin des problèmes des adultes ou/et loin des adultes tout court.Le moins que l’on puisse dire c’est qu’ils se donnent les moyens d’y arriver et de vivre leurs rêves.Suzy emporte avec elle son chat et les boites de thon de ce dernier et aussi de la nourriture spirituelle,une valise remplie de livres.Livres qu’elle lit à Sam le soir devant un feu de camps comme un vieux couple.Quant à Sam en parfait gentleman et scout,il s’occupe de la nourriture et de la vie générale de leur nouveau foyer.A travers eux,ce sont nos rêves d’enfant que nous revoyons défiler devant nos yeux.Nos souvenirs,nos rêves et nos espoirs aussi.Et puis,qui enfant n’a jamais rêver de faire une fugue pour une raison ou une autre?Oui,le temps d’un film on se retrouve enfant,à vivre avec insouciance et à croire en des choses simples.A croire que tout est possible.
Malgré cette légèreté apparente,il y a une certaine mélancolie,nostalgie qui se dégage de ce film.Quelque chose aussi de presque dramatique ou plutôt de purement adulte.Les regrets,l’incompréhension,le désamour,l’insatisfaction,la peur,le désenchantement,le renoncement aussi.Tout ceci s’exprime notamment par le biais de Mr Bishop incarné par Bill Muray.Son personnage est totalement désabusé,piégé dans un quotidien qui ne le rend pas heureux mais qui au moins le sécurise peut-être.Quant à sa femme,elle cherche des réponses et du réconfort là où il y en a.A travers leurs yeux,la réalité nous parait moins enjouée,moins facile plus adulte certainement.Sam et Suzie semblent vouloir prendre une direction complétement opposée à celle de leurs parents et des adultes plus généralement.Le film semble jouer sur cette dualité entre l’enfance et l’âge adulte,cette incapacité à être l’un en étant l’autre comme si tout n’était finalement qu’une question d’âge,de perception des choses et de passage surtout.
J’ai eu l’impression qu’il y avait un peu beaucoup de Sam en Wes Anderson ou inversement.D’ailleurs,quand on voit le réalisateur sur une photo ou autre on a l’impression que c’est un grand enfant,un authentique rêveur et un nostalgique né.A t-il connu une enfance similaire ou aurait-il aimé en avoir une comme celle de Sam et Suzie?Une enfance « bénie » où les familles n’étaient pas rivés devant la télé et les enfants devant une DS.Un temps où on correspondait encore par lettre avec l’attente et l’espoir qui vont avec.D’ailleurs,ces lettres qu’échangent Sam et Suzie m’ont fait penser à la première lettre d’amour que j’ai reçu.J’étais au CM2,il s’appelait Fabien et il avait dû changer d’école en cours d’année.Quelques temps après son départ,j’ai reçu une lettre de lui à l’école.C’est mon institutrice(qui était aussi ma tatie)qui l’a lu en premier pendant que je trépignais d’impatience sur ma chaise.Une fois que je l’ai eu dans mes mains,j’ai ouvert l’enveloppe.C’était une feuille simple à carreaux de couleur verte,l’écriture était un peu penchée mais qu’importe j’adorais ce que j’y voyais.Je me souviens de çà et pourtant je serai incapable de vous dire quelle était le sujet de ma première conversation MSN ni avec qui.Je me souviens aussi qu’à mon école,mes copines et moi nous nous faisons des boucles d’oreille avec des fushias à l’instar de celle en scarabée que offre Sam à Suzy.Oui,c’était le bon temps le temps de l’innocence et des bonheurs simples.Avec un rien,on faisait tout et on se créait un monde bien à nous.
Moonrise Kingdom c’est notre enfance retranscrite sur grand écran en peut-être plus folklorique.Moonrise Kingdom met en lumière le temps des promesses,de tous les possibles et c’est tout simplement magique et vivifiant.
