// No Spoil //

Je n'irais pas par quatre chemins : Joachim Trier nous livre avec une simplicité déconcertante une oeuvre magistrale.

D'abord parce qu'il nous épargne tout artifice : il mise sur l'émotion brute telle qu'on la vit au quotidien. Oubliez les violons et autres pianos qui pointent leurs tristes mélodies à chaque moment d'émoi, oubliez les plans interminables sur des visages larmoyants : ici c'est la vraie vie, la dure vie.
Tout repose sur le jeu des acteurs, ou devrais-je dire le jeu d'un acteur. "Oslo, 31 août" nous raconte une journée de la vie d'Anders, toxicomane qui tente de renouer avec la réalité. Plus les minutes passent, plus on se prend d'affection pour ce jeune homme brisé dont on ne connait presque rien.

C'est à travers cet esprit tourmenté que Joachim Trier nous révèle l'essence même de son film : la confrontation à l'existence.
D'abord la confrontation à sa propre existence : à l'instar d'Anders, nous dressons tous un jour ou l'autre le bilan de notre vie, "Qu'est-ce que j'ai fait de ma vie jusqu'à présent ?", "Tout ça a-t-il réellement un sens ?"... Autant de questions auxquelles il est impossible de répondre tout seul.
Le réel sujet du film est la confrontation aux autres : la capacité à pardonner, le besoin d'être pardonné ; la capacité à nouer des relations, le besoin d'être considéré. Anders a besoin de tout, et n'est plus capable de quoi que ce soit. Il observe jalousement les autres - leurs futiles discussions autour d'un verre, leurs balades autour du lac - se disant de manière fataliste que tous valent mieux que lui, il ne fera pourtant rien pour changer.

Trier l'a bien compris, c'est dans le manque que l'on mesure la perte. Le refus de vivre d'Anders, son incapacité à s'accepter lui-même et à se reconnecter avec les autres, l'impossibilité pour ses amis de se défaire de leur confort pour lui tendre la main dont il avait tant besoin : autant d'éléments qui nous indiquent qu'une vie solitaire n'est pas envisageable.

Notre vie s'apparente à cette jolie mélodie jouée sur un piano désaccordé : malgré ses imperfections, elle a été écrite pour être entendue.
imleowhite
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le 6 févr. 2013

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Leo White

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