Ni reboot ni remake, le blockbuster de l’été 2013 marque le retour sur grand écran de Guillermo del Toro après quelques contrariétés (débouté du tournage de The Hobbit). Mêlant fantastique et SF dans un présent fantasmé, Pacific Rim est un divertissement exceptionnel, étranger à toutes références géopolitiques : on est tenté de résumer Transformers meet Inception mais Pacific Rim est encore au-delà puisque Guillermo del Toro y invente tous les repères, pour un spectacle titanesque, auto-référencé, à la fois mature, généreux et ingénieux. En parfait geek revendiqué, le cinéaste mexicain accomplit un rêve d’enfant en rendant hommage aux kaijū eiga, ces films de monstres japonais ayant donné lieu à plusieurs franchises dans les 50s et dont Godzilla est la figure la plus représentative.


Et cette emphase est communicative : Del Toro déroule des enjeux limpides, sans niaiserie ni ambition métaphysiques, simplement pour le plaisir des sens. Le face-à-face des Kaijū, monstres issus des océans, et des Jaeger, robots géants pilotés par les hommes pour tenir les créatures en échec, débouche sur un climax de trois quart-d’heure de pures scènes d’action, dégageant une poésie organique et concluant en apothéose ce feu-d’artifice. Si une suite est probable, Del Toro n’a pas fait dans la rétention pour autant, parvenant même à synthétiser la matière d’une saga sur un seul long-métrage ; tout au plus, on peut reprocher au film de ne pas laisser le temps de prendre de recul, mais c’est un moindre mal, mieux, c’est sa plus grande victoire. Car face à Pacific Rim on profite du moment présent et ne voudrait pas être ailleurs : c’est rare et c’est l’une des missions premières du cinéma, même si on finit par l’oublier, d’autant plus lorsqu’on le fréquente assidûment.


Comme pour les Hellboy, la limite de Pacific Rim est dans sa modération sur la dimension humaine, matière à la fois franchement et superficiellement abordée. Toutefois Del Toro réussit parfaitement l’identification aux personnages ; il réussit même à donner corps à l’aventure elle-même et tisse ainsi un lien entre ses fantasmes projetés à l’écran et notre esprit dévoué, en réveillant une sorte de transe enfantine par son imaginaire vertigineux, mais aussi et surtout, viscéral ! Lorsqu’un virtuose parle aussi le langage des tripes, c’est l’accomplissement. L’idée de la fusion entre deux unités (la « neuro-compatibilité » des co-pilotes, l’association des deux scientifiques) sert ce dessein ; et les acteurs font également fusion avec ce tourbillon (au lieu de l’accompagner doctement comme souvent dans le genre), au point que leurs performances suscitent le même attachement ; Idris Elba (le héros de Luther) en Général, Mako et Raleigh partageant le pilotage du Jaeger et les destins cabossés, ou le nerd fou, sorte de Sid de L’Age de Glace en mode surdoué, sont autant de héros catégoriques, inspirant la proximité (ils sont simples) et l’attractivité exercée par ceux qui savent prendre le risque de sauter dans un bain de lave.

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le 9 sept. 2013

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Zogarok

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