Jerzy, un metteur en scène polonais, cherche à reconstituer des tableaux célèbres de Rembrandt, Goya, Delacroix et d’autres dans un studio de cinéma mais est sans cesse insatisfait de l’éclairage. Renvoyée de l’usine toute proche, une jeune ouvrière bégayante y provoque une grève. Le film montre par différents moyens la rencontre de ces deux mondes, celui de l’art et du travail.


Passion n’est pas le premier film dans lequel Jean Luc Godard est influencé par la peinture. Déjà dans Pierrot le fou (1965), Godard faisait allusion à des grands maîtres de la peinture, tel que, Renoir, Picasso ou Matisse. Passion, lui, se présente comme l’histoire du tournage d’un film, constitué d’une série de reconstitutions de tableaux. Dans le scénario du film, le cinéaste évoque ces tableaux qu’il entend filmer de façon à ce que « chaque reconstitution soit le prolongement de l’action qui l’a précédée ». Une première approche qui guide le spectateur sur la piste de la mise en abîme, même si c’est plus sur le mode du parallélisme que Godard pense la relation entre cinéma et peinture ici, qu’il exprime d’ailleurs très bien dans le raccord des images. Godard tire les émotions de ces tableaux en les matérialisant, et souvent, en les opposants à « la vie ». Passion montre vraiment le désir de confronter le monde moderne aux références classiques, tout au long d’un film qui, dès le premier son, s’affirme comme le refus de la narration. En effet, la peinture prend le relai du récit au présent, comme en atteste par exemple le traitement du désir et de la nudité féminine, question éthique et esthétique qui sous-tend une bonne part des plans du film. Par ailleurs, ce parti pris narratif de mener Passion à travers des « tableaux de maîtres », trouve son origine par le voulu obsessionnel de Godard de savoir « comment raconter » et non « que raconter ». Dans ce film, sont donc essayées différentes façons de faire travailler les rapports entre peinture et cinéma au travers de la lumière, du sujet, de l'émoi érotique, du travail de la composition, de la mise en scène et de la métaphore.Le tableau est doué de la troisième dimension du temps, il analyse, déconstruit, et interprète à la fois chacun des tableaux en question, tout en leur donnant vie.
Passion multiplie donc la fragmentation, la déconstruction, non seulement de ses plans et de ses images, mais aussi de sa bande son, pour multiplier les rapprochements et les liens entre deux mondes très distincts, ceux du travail et celui du monde artistique.

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le 7 juin 2015

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Nooodles

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