Un film de policier sans Olivier Marchal, voilà qui est intriguant. Marchal a cannibalisé le genre et on peine à voir d’autres types de film qui traitent la police en dehors du registre "loyauté-trahison-bonhomme-des couilles sur la table". Maïwenn se frottant au genre, why not ? Attention si vous l'avez pas vu, je risque de dévoiler des scènes du film.
Seul le début du film sauve l'ensemble d'une note désastreuse. Je pense qu’après la scène se déroulant dans la cantine, le film sombre tel un poulet à qui on vient de couper la tête.
Polisse ne me gène pas tant dans son point de vue pro ou anti flic, à mon avis elle s'est bien gardée de se positionner mais devient du grand n'importe quoi dans la narration, dans la mise en scène et dans le jeu d'acteur hystérique.
La narration n'est qu'un assemblage d'histoires choc, d'idées poignantes dont le but unique est de bousculer le spectateur, à grand renfort de pathos, de cris, de décalage, on force le sentiment d'empathie ou d'antipathie. Succession d'émotions pour faire un film "grand 8 émotionnel". Ce choix rend du coup impossible la prise de distance du propos, elle stérilise tout propos de fond, quelle position peut on avoir autour d'un bus de la police avec des enfants roms jouant au son d'une pop à la mode ? Ou d'une fête dans une boite de nuit après qu'un bébé a été sauvé des bras d'une mère folle qui l'a laissé tombé par terre ?
Voilà, Maïwenn au son doux "hard life, real life" nous balance des bribes de vies, d’enquêtes réelles ou pas mais mis en scène pour en forcer le trait, pour en dégager un maximum d'émotion. Tout s’enchaîne dans une succession qui n'a pas vraiment de fil conducteur en dehors d'une temporalité toute scolaire (ben ouais on fini avec les grandes vacances d'été, comme l'école).
Le fond du film est dans un parti pris dénonçant les parents. Vous ne trouvez en 2 heures de pellicule, pas un seul parent sécurisant, pas une seule image parentale positive. Enfin si, à la fin, elle fait le choix de mettre en scène les policiers qui amènent leurs enfants à l'école avec tendresse, proximité et douceur. La police est le parent ultime de la société. Maïwenn transforme la police comme le seul parent pour ces enfants. Le commandant est l'illustration classique du papa (d'ailleurs à plusieurs reprises c'est son petit nom), à qui on dénonce ses compromissions face à la hiérarchie comme un ado dénonce les compromissions du père.
Cette même police se transformant dans un rôle maternel quand il faut égayer les enfants roms ou quand il faut trouver un hébergement à cet enfant africain.
Ce serait malhonnête de dénoncer un parti pris dans un film et ensuite lui reprocher un manque de profondeur. Ici ce qui gène le propos c'est que la mise en scène vient gommer en apparence un parti pris, la mise en scène "embedded" qui se veut dans une pseudo objectivité, ne vient en fait que masquer encore plus le propos de fond. Elle souhaite montrer une complexité mais en fait, elle simplifie à l’extrême et pour lisser cet effet simplificateur, on balance de l'émotion.
Je reviens pas sur les histoires d'amour qui sont foireuses et caricaturales au possible. Tout est dans le stéréotype (l'anorexique, l'arabe, la lesbienne, l'intello, le papa, le bad boy, la môman, etc) On a un florilège, il ne manque que l'homosexuel...tiens ?
Bref. Maïwenn c'est pathos. Faut le savoir et apprécier le pathos. Tout est orienté en ce sens jusqu'à l'extrême seconde du film elle compte bien nous en jeter à la tronche ad libidum.
Le jeu d'acteur est hystérique, comme on est dans le pathos, on exclue la finesse, la nuance. Tout est radical, tout est caricatural. Joey Starr fait du Joey Starr et lui seul console Omar de sa séparation avec sa mère. On le voit danser sur une musique disco et donc il remplit le rôle de l'indigène intrinsèque dans tout film Français.
On voit défiler les caricatures de personnages ( le bourgeois manipulateur qui a du réseau, la jeune ado délurée, la maman dépressive, l'islamique, le mafieu de l'est) et c'est un florilège. Mon seul étonnement c'est qu'on a pas vu l'avocat ou le procureur véreux. Peut être parce que c'est Olivier Marchal qui kiffe la justice véreuse, qui sait ?
Voilà. Polisse est un mauvais film, entendons nous qui n'est sauvé que par son début. Oui Maïwenn nous a répété à l'envie que c'est réel tout ça. Si les faits sont réels, la mise en scène est elle, une interprétation. Ici son idée n'est pas de présenter un quotidien, mais mettre en scène un quotidien pour en proposer un fond rageux contre les parents, avec des brochettes d'adultes tous plus paumés, les uns que les autres.