Pour ce troisième film, Clouzot a voulu réaliser une enquête policière dans le Paris des années 40. Suzy Delair et Bernard Blier incarnent un couple en crise ; elle, accusé d'avoir des mœurs légères pour avancer dans sa carrière de chanteuse, et lui un impénitent jaloux qui va franchir la ligne jaune quand il va voir un vieil homme faire des avances à sa femme. Arrivera alors l'inspecteur Antoine pour résoudre l'enquête sur cet assassinant.
Décrivant de manière très réaliste le Paris de cet époque (en même temps, le film est contemporain), le film impressionne par sa qualité d'écriture, sa mise en scène toujours alerte, et par une grande interprétation des acteurs. Que ce soit Suzy Delair, Bernard Blier ou le fantastique Louis Jouvet, tous incarnent au diapason leurs personnages dans une histoire plus maline qu'elle n'en a l'air. La scène des larmes de Bernard Blier est à ce titre magnifique.
Pourtant, le charme n'a pas totalement agi sur moi comme sur d'autres films de Clouzeau à l'instar de L'assassin habite au 21 ou Le corbeau, peut-être est-ce un peu trop long. Ou alors le cabotinage forcené de Jouvet, que j'aime beaucoup cela dit. Mais il y a de quoi être satisfait quand on voit des scènes aussi fortes que l'interrogatoire au Quai des orfèvres.
Là où le film m'a surpris, c'est dans sa démonstration métaphorique de la sexualité ; que ce soit l'assistante de Suzy Delair, dont on peut comprendre qu'elle soit lesbienne, ou La chanson Danse avec moi qui finit par un halo de lumière sur la bouche de la jeune chanteuse, sans oublier ce plan sidérant où, se dévoilant en guêpière devant son mari, Bernard Blier abandonne son lait qu'il fait chauffer, et on comprend très bien ce qu'il se passe avec juste le plan de la casserole qui déborde !
Malgré mes réserves, c'est un film très fort et démontre l'énorme début de carrière de Clouzot, placée sous le signe du policier.