Le voici, l’ultime épisode de la saga Star Wars, celui qui doit tout conclure, qui doit mener de manière logique et intelligente à la trilogie originale. Celui où enfin le méchant le plus charismatique de l’histoire du cinéma doit naître. En sachant cela, les jeunes de la nouvelle génération trépignent d’impatience à l’idée d’avoir un nouvel épisode plein de batailles épiques, et de voir arriver ce méchant trop cool dont tout le monde connait l’existence. En sachant cela, ceux de la précédente génération craignent le pire, s’attendent au désastre le plus triste de la saga.


En effet, comment réparer les erreurs initiées par les deux premiers volets de cette trilogie ? Comment, en un seul épisode, faire naître tous les enjeux de la transformation d’Anakin en Dark Vador ? Comment faire naître l’intense apparition et la dispersion du côté obscur alors que celle-ci ne se sent à aucun moment dans les deux premiers volets ? La chose s’annonce difficile.


Et pourtant… et pourtant… Cet épisode est certainement celui qui fait le plus d’effort de toute la prélogie. Comme si, soudainement, Lucas s’était réveillé et rendu compte de la merde dans laquelle il s’était fourré, et qu’il fallait faire tout au mieux pour redorer le blason de sa saga.


Et c’est ainsi que le film commence sur un plan séquence de toute beauté, par des effets spéciaux qui mettent toujours une claque, par des combats dans l’espace qui brillent d’une intensité inespérée, et une noirceur instaurée dès le combat contre Doku. Il y a également une volonté de remplir le background, via la présence d’un méchant Charismatique, le Général Griveous. Jugé parfois sous-exploité, il l’est toutefois autant que Boba Fett dans la trilogie originale qui pourtant a déchainé les foules à son époque. Ce droïde incarne la force que ceux-ci auraient du avoir dans les deux premiers épisodes. Cet à côté est très appréciable. Le film se dote également de passages parmis les plus tragiques de la saga. L’appel de l’ordre 66 me met encore des frissons dans le dos. Et le combat final entre les deux personnages qui sont comme des frères a une aura dramatique très appréciable. Le Anakin/Dark Vador est également plutôt réussi.


Pour tous ces aspects les fans de la nouvelle heure n’ont pu que tomber sous le charme de cet épisode et de l’Anakin tro d4rk.


Mais mais mais… En grandissant un peu on se rend vite compte que rien de tout cela n’est crédible. La transformation d’Anakin en Dark Vador n’a aucun sens. Anakin est ici le plus gros pigeon de l’histoire du cinéma. Les plans de Palpatine sont tellement gros, tellement sursoulignés, lui-même est tellement chelou que si tu le trouves pas intriguant tu es juste un gros bouffon. Et c’est le cas d’Anakin. Le sénateur lui parle des Sith, il cherche à avoir du pouvoir, il l’incite à tuer, le conseil du Jedi pensent qu’il est un sith, mais non, Anakin ne voit rien, il se laisse avoir. Bonjour monsieur le clochard de l’espace. Alors okay il ne veut pas perdre Padmé, ce côté tragédie grecque est une idée bien trouvée… mais tout de même, ça aurait pu tellement mais tellement mieux être amené.


Mais comment donc ? Et c’est bien cela le problème. Lucas est obligé de passer par ces raccourcis énormes pour raconter son histoire. Des éléments auraient du arriver dans les deux premiers volets pour amener à cette fatalité. Cette fatalité qui est, rappelons-le, la raison d’être de cette prélogie. A la place, ce qui a prédominé dans l’intrigue est cette histoire avec la Fédération qui fout le bordel dans la galaxie avec des plans dont on ne comprend pas les enjeux. Ceux-ci sont totalement évincés de ce troisième opus. On les voit toujours, mais leur importance a été réduite, on s’en fout d’eux. D’ailleurs, on s’en est toujours foutu, et c’est d’ailleurs ça le problème permanent de la prélogie entière. Les enjeux galactiques ne sont pas assez grands pour happer les spectateurs comme la trilogie originale le faisait.


Lucas a donc été obligé d’aller vite, trop vite, comme on ne pouvait que s’y attendre. Comme l’histoire d’amour du 2, la transformation en Dark Vador, véritable moment pilier de la saga, n’est pas crédible. Cette déception immense, que j’ai pu avoir en ayant grandi depuis la sortie du film, les spectateurs de la première heure l’ont subit à leur grande tristesse.


Et pourtant il y avait des manières de raconter cette transformation, aussi rapidement, avec un peu plus d'intelligence. Au lieu de faire d'Anakin un crétin sans cervelle qui ne réfléchit à aucun moment, on aurait pu, je ne sais pas... lui donner un minimum de charisme pour être à la hauteur de Dark Vador ?
On aurait pu nous montrer Anakin de manière intelligente, nous montrer qu'il a connaissance du mal que sa décision va engendrer, qu'il n'est pas manipulé par l'Empereur car il est aussi intelligent que lui, mais qu'il accepte de rejoindre le côté obscur par simple soif de puissance et par désir de sauver son aimée.
Mais dans ce film, Anakin est aveugle. On nous le montre comme tristounet et inquiet, mais son désespoir n'est jamais palpable... Il se laisse simplement berner de la manière la plus bête qui soit.
On ressent probablement cela car toutes les séquences menant à son évolution sont bien trop rapides et expédiées. La scène de l'adoubement et tout ce qui la précède est d'un ridicule sans nom. C'est censé être dramatique... mais on n'y croit pas.
Pire encore : tout ce qui suit. A partir de cet instant, la personnalité d'Anakin va changer du tout au tout, en un claquement de doigt. Aucune évolution construite, juste un shift bête et stupide. Comment croire à ce personnage ? Le personnage lui-même est en roue libre ! Tous ses dialogues auprès d'Obi-Wan sont d'un ridicule sans nom.
Je sais qu'on essaie de nous montrer que le côté obscur de la force embrume l'esprit d'Anakin, mais il y avait des manières plus fines de le faire. Anakin déblatère un nombre d'absurdité dans cette séquence, ça dépasse l'entendement.


Il faut tout de même admettre que certains de ces dialogues, qui sonnent pourtant de manière très écrite, se révèlent efficaces. Quand Padmé confronte Anakin, celui-ci déborde de folie et de soif de pouvoir de manière très intéressante. La haine nouvelle naissant entre Anakin et Obi-Wan doublé de leur amour fraternel a quelque chose de très fort au niveau émotionnel. Je ne peux m'empêcher d'avoir le coeur brisé à chaque fois que Obi-Wan lui déclare son amour. Cette scène est probablement la plus réussie de tout le film.
Mais tout aurait été bien plus fort, bien plus réussi, si l'évolution menant à ce niveau de folie d'Anakin avait été plus écrit, mieux amené, avec ce qu'il faut de finesse et d'intelligence. Dans le film, Anakin est gentil et deux heures plus tard il devient un monstre massacrant des enfants. Je n'arrive pas à croire à ce scénario.


Malgré cela, cet épisode arrive à se sauver d’un désastre annoncé par son ambiance, sa musique (elle jouit de thèmes « noirs » excellents), et ses combats. Mais ces combats, malgré leurs effets spéciaux, sont trop longs, trop exagérés. Ainsi, le combat de Yoda est inintéressant car on connait déjà l'issue et qu'il est trop long. De même, même si le combat final entre Anakin et Obi Wan est excellent, il se retrouve trop allongé, avec des tentatives pour varier les situations. Attention, c’est un beau combat. Mais on est loin de l’intensité des combats entre Luke et Dark Vador, certes lents, mais où le suspense et la pression sont à leur comble, où le spectateur jouit secrètement au fond de son siège. Ici, c’est dynamique, mais est-ce réussi d’un point de vue cinématographique ? Pour moi le plus gros défaut de cette séquence, c'est quelle est constamment hachée. Dès qu'il commence à y avoir un peu d'intensité, il y a une coupure pour nous montrer ce que fait Yoda. Ca nuit vraiment au rythme de l'action et empêche l'implication du spectateur.


Pour résumer, un épisode réussi, qui se rapproche de ce qu’on est en droit d’attendre d’un Star Wars. Mais il subit les tares qu’ont trainées les deux premiers de cette trilogie. Film réussi pour les plus jeunes, peut-être une bonne surprise par rapport à ce à quoi pouvaient s’attendre les fans plus anciens… qui a quand même un arrière-goût d’échec. Un épisode malgré tout honnête mais parfois presque médiocre car il passe à côté du coeur de son récit.
Le plus douloureux à propos de Star Wars III, c'est que j'adore ce qu'il raconte, son impact dramatique me touche beaucoup, mais je n'aime pas la manière dont il est amené, je n'y crois pas, je le trouve factice. Je me retrouve alors à contempler quelque chose que j'aime mais que je ne trouve pas légitime car il manque la construction pour en arriver là. Il y avait tout pour faire de ce film un chef d'oeuvre. Il y avait tout. Sauf la maîtrise de l'écriture.


C’est tout de même triste de devoir s’enthousiasmer devant un épisode pour la simple raison qu’il a la qualité qu’on devrait juger minimale pour une telle saga.

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le 28 oct. 2012

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