Attention, ce qui suit est un spoil géant. L'objectif est de modestement donner ma vision sur ce film polémique.

Partons sur le postulat de départ : le soleil est en panne, non pas par un manque de combustible comme c'est prévu dans un futur plus que lointain, mais parce que les réactions nucléaires ne se font plus. Résultat : il se refroidit rapidement (une centaine d'années quoi).
Est-ce possible ?
Franchement, personne n'en sait rien. Personne ne s'est approché de son noyau, et les forces démentielles qui s'y déroulent empêchent toute observation (la physique quantique tout ça...) Le film y fait allusion mais j'y reviendrai.
Donc, à ceux qui disent que ce n'est pas crédible, vous êtes mieux informés sur la question que tous les astrophysiciens. Félicitations ! :)

Postulons donc que c'est possible (puisqu'on n'en sait rien). Le film est scientifiquement crédible. Vaisseau non seulement réalisable, mais on se voit pas bien comment il pourrait être réalisé différemment : poussée/alimenté par le bouclier solaire qui protège des vents cosmiques (une pierre, deux coups), création d'oxygène, réserve de bouffe... tout est bien foutu et expliqué, le spectateur qui s'intéresse un minimum à l'espace n'est pas dépaysé.
A ce titre, sunshine est un modèle du genre, loin des armaggeddon, mission to mars et autres conneries...

Tout se passe comme sur des roulettes lorsqu'on apprend qu'Icarus I, la première mission, a échoué près du soleil. Icarus II, notre équipage, se trouve confronté à 2 possibilités :

1/ continuer la mission comme elle était prévue. Laisser Icarus I et son appel de détresse de côté, sacrifier les éventuels survivants tout ça.

2/ détourner un poil la mission pour aller voir, puisque c'est globalement sur la route (les types n'allaient pas prévoir 2 itinéraires totalement différents...).

Comme dans tout "bon" film américain qui se respecte, le détournement pourrait s'imposer : on ne va pas laisser des copains éventuellement vivants crever seuls dans l'espace !
Que neni ici, cette considération est absolument secondaire : la bombe d'Icarus II a épuisé toutes les matières fissiles de la Terre. C'est donc le dernier espoir. Comme expliqué plus haut, personne n'est allé au centre du soleil, personne ne s'en est approché, donc personne ne sait si la bombe va fonctionner, les variables étant infiniment complexes. Le physicien considère que 2 chances valent mieux qu'une. Si Icarus I est fonctionnel, sa bombe l'est aussi : 2x + de chances de réussir. Ils décident donc d'aller voir.

Oui, sauf que, qui dit détournement imprévu dit erreur humaine possible... Et vu la dangerosité de l'affaire, toute erreur minime peut entraîner des conséquences fâcheuses. Et puisqu'on est humain, l'erreur est inévitable.

Et c'est là tout l'intérêt du film : la faiblesse de l'être humain n'est pas abordée ici au travers de personnes lambda (comme dans Alien) mais à travers des scientifiques chevronnés. Et ça tient la route.

Reste à aborder l'élément véritablement polémique du film : son dénouement.

Au début, on voit le psychiatre passer de plus en plus de temps devant le soleil, littéralement absorbé par lui, prenant même des kiffs en s'exposant à un rayonnement trop intense. Lorsque le commandant trépasse, il lui demande même "qu'est-ce que tu ressens?". Dans le même idée, regardez donc un feu de bois... hypnotique non?
Connaissant Boyle, on se doute que ce psychiatre va probablement dérailler et compromettre la mission. Et bien oui, imaginez un peu, vous êtes à une distance qui vous permet de vous prendre des charges de drogué, et vous savez que si la mission fonctionne, c'en sera fini. Que se passe-t-il dans votre tête ?

Pourtant, à la grande surprise du spectateur attentif, Boyle nous déroute : le psychiatre n'y est pour rien, puisqu'il décide de rester dans l'autre vaisseau.1h qu'il nous mène en bateau !
La menace vient en fait du commandant de la première mission.

Sans queue ni tête me direz-vous ?

Le mec a tellement mangé du rayonnement qu'il ne peut absolument plus s'en passer. La même configuration que celle à laquelle on s'attendait donc : si aucun détournement n'avait été opéré, le psychiatre aurait pu tranquillement se manger une tonne de rayons, chacun vacant à ses occupations, et aurait probablement fait capoter la mission, comme la première fois.

A quoi la réussite de la mission tient-elle alors ?
Au fait de la détourner, de changer les plans, qui a poussé l'équipage à s'investir davantage dans la réussite coûte que coûte, à envisager peu à peu le sacrifice de chacun pour y parvenir, Icarus I servant d'épouvantail. Sans cela, la fin aurait été la même, inéluctable.

Scénario bidon ? Non : brillant !

Pourquoi 9 ?
Pour moi, très honnêtement, ça en vaut 8.
Techniquement, c'est nickel à 90% : images sublimes, musique très spatiale, acteurs très bons et bien dirigés... mais la manière de tourner la fin est franchement pas terrible.
Alors oui, on comprend le concept : le type est irradié, tellement irradié qu'il en est déphasé, que l'oeil humain ne le perçoit pas correctement. Reste que, de fait, c'est douloureux à voir, c'est confus, et ça gâche l'aspect émotionnel du final.

Pourquoi 9 ?
Parce que des films de SF de qualité, y'en a tellement peu.... !
SoiM
9
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Créée

le 3 août 2014

Critique lue 447 fois

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SoiM

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