On parle régulièrement de livre dont l’adaptation est impossible. "Sur la route" en fait d’autant plus parti qu’il est inadaptable à double titre. Avant même que la première ligne du scénario eut été écrite, avant qu’un nom n’ait été désigné pour le premier technicien ou figurant, le projet était voué à subir une double peine.

D’abord être à la hauteur d’un livre devenu "culte" (si l’expression a jamais voulu dire quelque chose) pour au moins deux générations, et dont l’origine de la vénération tient au moins autant pour son style que son propos. Ensuite d’avoir pour sujet les désirs de liberté et d’émancipation d’une jeunesse qui, à l’heure du Binge drinking, des projet X et des soirées Skins, parait forcément parfaitement désuète.

Une fois ces deux écueils contourné, que reste-t-il du film ? En dehors de son enjeu tétanisant, et en ayant en tête qu’au cours des années 50 fumer un joint pouvait vous envoyer en taule pour plusieurs années, alors que le poids des mentalités pesait sur vous avec la lourdeur d’un supertanker empli d’enclumes ayant coulé, quelles qualités préservent le film de Walter Salles ?

Un film agréable (même si moins réussi visuellement que "carnet de route", dans mon souvenir) qui tient sur ses personnages. Si Sal, caractère central, est le moins remarquable de la bande il est assez joliment entouré. Je continue à trouver Kristen Stewart indigne des tombereaux d’insultes qu’elle se prend sur le coin de la gueule depuis ses premières apparitions (je précise, je n’ai jamais vu Twilight, par contre, je l’ai apprécié dans "welcome to the Rileys" ou "les runaways"). Bref, je lui trouve son petit charme. Viggo Mortensen et Steve Buscemi sont comme d’habitude, mieux qu’un gage de qualité, une assurance classieuse.

Et surtout, surtout, Garrett Hedlund emporte carrément le morceau dans le rôle d’un Dean Moriarty aussi attachant qu’insupportable. En tout cas, moi, j’ai reconnu bien des amis de mes folles années étudiantes, vous savez, de ces types aussi tentateurs que désarmant et surtout toujours épuisants.
Et puis deux trois scènes réussies, qui sonnent bien dans le ton, comme la réaction de gêne de Sal lors de sa première proposition de plan cul à trois ou encore la dernière rencontre entre Sal et Dean, qui ne fait pas la part belle au "héros".

Voilà. Par contre, faudra arrêter de pondre des titres qui ne diffèrent que par un syllabe, parce que ça embrouille les gens. Quand j’ai parlé du film à ma mère, elle m’a dit qu’elle avait déjà vu ce film avec Viggo Mortensen qui marche avec son fils et un caddy inspiré par une chanson de Bernard Lavilliers. Ou Canned Heat.
Ça aide pas.

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le 26 oct. 2012

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guyness

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