Bien que The Barber soit un hommage au film noir, il se détache très vite de son modèle pour finalement devenir un drame assez sombre. Cette façon de s'affranchir des codes permet au long-métrage de ne pas s'enfermer dans son intention de départ et donc de proposer des choses relativement peu vues.
L'histoire, par exemple, ne s'ouvre pas sur un meurtre ou une disparition, mais simplement sur le quotidien du personnage principal, Ed Crane, tel qu'il le décrit lui-même (comme souvent chez les frères Coen, la voix off joue un rôle important). Cet homme aura, à un moment donné, un choix crucial à prendre, d'où découlera une ribambelle d'événements dramatiques. Il ne fera donc que subir ce qui lui arrive, jusqu'au moment tant attendu où il décidera de se reprendre en main.
L'esthétique générale de l’œuvre s'autorise elle aussi quelques libertés par rapports aux codes du film noir. Les cinéastes proposent à plusieurs reprises des images très claires, très lumineuses, en rupture totale avec l'ambiance nocturne et torturée inhérente au genre. Ces plans, comme on peut s'y attendre, sont très travaillés, surtout au niveau du positionnement de la source de lumière, et n'ont rien à envier aux scènes de nuit, plus sombres et aussi plus classiques.
La narration est peut-être le point le moins maîtrisé de l’œuvre. Un passage à vide se fait sentir au milieu du film, et la seconde moitié s'autorise quelques errances, en particulier la sous-intrigue avec le personnage de Scarlett Johansson, qui est amenée un peu lourdement pour n'avoir finalement que peu d'impact. L'ensemble bénéficie malgré tout d'un agencement des scènes efficaces. Les réalisateurs ont eu la bonne idée de faciliter leur enchaînement par des fondus au noir, qui donnent l'impression d'apporter un point final à une phrase cinématographique (généralement un monologue du personnage principal).
The Barber a donc su dépasser le simple hommage pour devenir une œuvre cohérente, qui, contrairement à Ascenseur pour l'échafaud, exploite toute l'ironie mise à disposition par le scénario.
Mais quand même, la dimension existentialiste du personnage principal m'ennuie profondément.