La fin de Batman Begins laissait entrevoir une suite et son méchant tout désigné, et c'est tout naturellement et sans surprise que l'on retrouve le héros masqué et bodybuildé aux prises avec le Joker dans ce nouvel opus consacré au célèbre héros de comic book. Après moult hésitations, c'est à Heath Ledger qu'est revenu le rôle du méchant de service, tandis qu'Aaron Eckhart endosse le costume deux morceaux de Double Face. La majorité des acteurs du premier volet reprennent leur rôle, à l'exception de Katie Holmes, remplacée par une autre potiche, Maggie Gyllenhaal.
Annoncé comme plus sombre que le précédent, force est de reconnaître que c'est le cas. Il fait nuit (si ça c'est pas une preuve), ça frappe dans tous les sens, la tension est palpable dans tout Gotham, des gens meurent (même si bizarrement, il n'y a pas une seule goutte de sang dans le film). Alors que Batman Begins était focalisé sur la peur, alimentée par l'Epouvantail et le sinistre Rhasal ... Rah Zal ... et le sinistre Ducard, The Dark Knight s'inscrit dans une logique illogique de folie à l'état pur.
Et là aussi il faut le reconnaître, Heath Ledger joue impeccablement son rôle. Loin de l'interprétation surjouée mais néanmoins cultissimme de Jack Nicholson (dans le Batman de Tim Burton), le Joker apparaît comme sale, maquillé (et non dissous à l'acide, comme certains), complètement fou, mais sachant pertinemment ce qu'il fait. Un électron libre venu semer le chaos dans une ville qui commençait à remonter la pente. De là à dire qu'il mériterait un oscar à titre posthume, il ne faut quand même pas abuser. D'accord, il est bien, mais tout laisse à penser qu'il a été victime de l'effet Marie Trintignant. C'est parce qu'il est mort que ses films sont géniaux (un peu comme Grégory de la Star Ac' qui n'a jamais vendu autant d'album... de son vivant).
Parce que oui, le film a aussi des défauts. Un montage parfois bizarre (une scène qui apparaît entre deux autres, sans réelle transition, en coupant la musique tout net), quelques invraisemblances (la façon employée pour trouver une empreinte, qui n'est pas dans les fichiers de la police, ...), mais pire, la voix de Batman, qui réduit à néant la crédibilité des scènes sérieuses dans lesquelles il parle (si si).
Au niveau de ses qualités, parce qu'il y en a aussi, outre le Joker (dont le tour de magie est exceptionnel), les scènes d'action survitaminées, la confrontation entre les deux personnalités, le scénario et les manipulations du Joker (encore lui), mais surtout, grande qualité qui a été occultée par le décès d'Heath Ledger, et qui a relégué tous les autres rôles au second plan (même le Batman amorphe à la voix de méchant de série Z), la prestation d'Aaron Eckhart.
Parce que oui, le film raconte aussi la tragédie personnelle d'un homme, juste parmi les justes (Juste Leblanc inclus), menant sa croisade contre le crime mais glissant peu à peu dans la folie suite à un terrible évènement qui le conduira à passer du statut de fidèle allié de Batman, à celui de grand ennemi, Double Face. Et là, les maîtres des effets spéciaux ont fait fort, très fort. Le faciès déformé du pauvre Harvey fait frissonner lors de la première apparition, et fait oublier sans mal le piètre maquillage violet de Tommy Lee Jones (Dieu merci). Et la musique qui accompagne sa réplique sur la justice, signée par James Newton Howard, est sublime. Seul reproche, qu'il apparaisse un peu trop tard, un peu comme Venom pour Spider Man III.
Au final, un film pas aussi exceptionnel qu'on pourrait le croire (ou qu'on l'a laissé dire), juste un bon film du genre, un film à voir, oui d'accord, pour le Joker, mais aussi pour Double Face, pour Batman, et pour comprendre ce qui se passera dans le troisième volet, d'ores et déjà prévu.