The Killer
7.6
The Killer

Film de John Woo (1989)

Avec un film tel que The Killer, il n'est pas facile pour moi de trouver de nouvelles choses à dire. Le film de John Woo a plus de vingt ans, il est considéré comme un classique depuis des années (depuis le début ?), il a inspiré plusieurs cinéastes qui, à leur tour, sont considérés comme des grands. Pour ma part, j'ai mis près de quinze ans avant de regarder à nouveau The Killer. Je ne l'aimais pas. J'ai un peu changé mon avis.

Le pivot central du film est évidemment Jeff, le personnage de Chow Yun-fat que John Woo iconise très vite en débutant le film dans une église, à côté des statues de saints. On lui demande de remplir un contrat puisqu'il est tueur à gages. L'assassinat aura lieu dans une boite de nuit où Jeff remarque Jenny (Sally Yeh, qui interprète les chansons elle-même), chanteuse qui assure l'animation. Jeff tire sur sa cible et dans la confusion Jenny est blessée par les tirs des hommes de la victime. Elle devient pratiquement aveugle. Jeff a juste le temps de mettre son écharpe blanche sur ses yeux pour la protéger.

Jeff culpabilise et va rencontrer, sans dévoiler son identité, Jenny. Il veut l'aider à trouver de l'argent pour se soigner. Il va accepter un gros contrat où il doit tuer un parrain de la mafia. Ce parrain doit assister à la fête du dragon et c'est l'inspecteur Li (Danny Lee), flic incorruptible et droit dans ses bottes qui est chargé, avec son collègue Tsang (Kenneth Tsang) de la protection de l'homme. Ce qui dégoûte Li. Quand Jeff tue le parrain, Li part à sa poursuite. Mais c'était un piège. Jeff est attendu et on tente de l'abattre. Dans la fusillade, une petite fille est blessée. Bien que poursuivi par la police, il va la conduire à l'hôpital.

Le tueur est un type bien, se dit Li. Sa hiérarchie ne l'entend pas de cette oreille. Elle veut l'abattre. Tout comme Wong (Shing Fui-on) veut l'abattre alors que c'est lui qui a commandité l'assassinat de son oncle pour prendre sa place. Bref, tout le monde veut la peau de Jeff. John Woo parvient très bien à rendre l'ambivalence de sa position. Tueur à gages, il est aussi protecteur de Jenny puis s'approche de Li dans une belle scène où ils s'appellent Dumbo et Mickey, tout sourire, en se pointant avec leurs révolvers devant Jenny qui n'imagine pas une seconde qu'ils sont ennemis. Cette séquence est devenue la marque de fabrique du cinéaste, son image de marque. Elle est devenue identifiable au premier moment faisant souvent oublier le reste du film.

The Killer n'est pas seulement un film d'action policier avec sa longue scène finale de gunfight, chose classique chez John Woo déjà présente (avec des sabres ou du kung-fu) dans ses films des années 1970. Dans cette séquence finale, le blanc (Jeff, Li et Jenny sont vêtus de blanc) s'oppose au noir (les hommes de Wong). The Killer est aussi un mélodrame où l'on voit Jenny progressivement tomber amoureuse de Jeff tandis qu'il lui fait espérer une guérison prochaine. Li est là pour contrecarrer les plans de ce couple tandis qu'il va se prendre de sympathie pour eux deux et devenir ami avec Jeff. Le mouvement circulaire des relations entre le trio n'amène aucune échappatoire. Il n'est question que de morale dans le film.

Le film brasse son lot d'émotion, d'action violente et de suspense. Il offre des images qui ont fait l'histoire. Chow Yun-fat qui est submergé par le sang quand Jenny se rappelle le moment où elle perd la vue. John Woo travaille aussi beaucoup sur le son pour rendre plus efficace son suspense. Lors d'une poursuite, Li prend en chasse un membre des triades qui se réfugie dans un bus. Le son intradiégétique disparait progressivement pour ne donner à entendre que le clic du révolver qui s'arme. Il travaille son montage lors de la fête du dragon où les plans du tambour qui va jouer de la musique alternent avec la préparation de l'exécution du parrain. Ensuite, tout est une question de croyance. Je trouvais il y a quinze ans le mélodrame simpliste et le suspense convenu, l'idée de film culte au sujet de The Killer me révulsait. Aujourd'hui, je me rends compte des qualités de mise en scène de John Woo.
janodo
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le 26 nov. 2010

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Jean Dorel

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