Télés, radios, téléphones. Tout est hors-service, & tout diffuse ce même signal continu, ces ondes sonores & visuelles perturbantes.
C'est dans ce contexte que le spectateur suit l'histoire d'une fille fragile, de son mari violent, & de son amant romantique. Le film se décompose donc en trois parties, chacune gérée par un réalisateur différent, ce qui donne un résultat toutefois plutôt homogène, & une agréable surprise.

Ce qui est magique avec ce film, c'est qu'on peut le découper de plusieurs manières différentes. En effet, je pensais sans encombre tomber sur un énième film de mort-vivants : il s'avère que ça n'en est rien, ou du moins pas totalement. Les gens captivés par le signal deviennent des fous, des enveloppes corporelles ambulantes qui suivent leurs pulsions primaires, & ainsi éradiquent pratiquement toute forme de vie autour d'eux. Ils font du mal, beaucoup de mal, sans parfois s'en rendre vraiment compte. & ils sont impossibles à raisonner, sauf si on accepte leur délire & qu'on joue avec eux. Ainsi, mis à part le fait qu'ils ne s'entre-dévorent pas entre eux, ils restent des zombies classiques : des légumes avançant pour tuer, guidés par on-ne-sait-quoi (ici, la vérité que fait passer le signal, ou plutôt ce qu'ils pensent être la vérité, ce qui est en fait ce que le signal désire faire passer comme vrai). Le film en lui-même est très violent, très gore : on a droit à des effusions de sang, des meurtres sans vergogne, quelques passages si violents qu'on sent presque le vomi monter à la gorge.
& pourtant, on a des césures. Le film alterne violence primaire & scènes drôles : pour nous rendre plus amadoués, vous dites ? Oui, bien sûr, mais dans le but d'être encore plus dégoûtés par la scène de gore qui suit. Ce film se situe donc sur une échelle psychologique de très grande envergure. Ici, contrairement au film de zombies classique, on n'a pas accès aux médias & aux informations, tout est coupé, tout le monde est délaissé à sa mort probable. Certains finissent par se soumettre & regardent la télé, aussi près que possible. La mise en scène du film est finement orchestrée, certaines scènes ne durant qu'une demi-seconde parviennent à marquer nos esprits pendant les minutes qui suivent. La photographie est très bonne, & c'est ce qui permet au spectateur de s'immerger complètement dans cette ambiance complètement malsaine, qui frise la démence pure. Les personnages alternent entre leurs réalités & la nôtre. C'est pourquoi on a toujours un doute très sérieux sur leurs identités, & ce jusqu'à la fin. Je suis sorti fumer une clope après ce film, & je peux dès lors assurer que je me suis bonnement cru fou : oui oui, car en plus d'être très violent, choquant, gore, sincèrement dingue, drôle, bien foutu, & magistralement mis en scène, on a le droit à des gros plans sur les télés piratées par le signal, signal qui nous emmène très loin.
Enfin comment ne pas se rendre compte de l'évidente satire qui s'étale dans ce film ? Le monde d'aujourd'hui, pourri par les télé-communications. Les gens qui acceptent le statut de mouton sans broncher, chacun étant dépendant aux conneries racontées quotidiennement. & si, dans tout ça, dans toute cette supercherie, il n'y avait pas un signal ? Les gens abrutis par la télé ne sont-ils pas eux aussi des légumes sans âme ? Des coques vides, obéissant peu à peu aux réalités que proposent les programmes télé ? A la fin du film, on voit Maya, attachée à un fauteuil roulant, des dizaines de télévisions émettant le signal devant ses yeux : son cerveau est complètement bouffé, elle tremble telle une folle, elle est condamnée. Puis on la déconnecte en lui faisant écouter cette fameuse chanson qui est de Joy Division à l'origine. Alors, c'est ça la solution ? Déconnecter les gens ? Ce n'est pas aussi facile.

Le film est très caricatural sur ce dernier point : la population est de retour à l'état primaire, la vérité individuelle, l'opinion reine de chacun. Dans notre réalité, les gens sont dotés d'une once d'intelligence, ont quelque peu de raison, mais on peut les rapprocher en tout point aux zombies de "The Signal".
Ce film, très surprenant, a été une grande claque pour moi. J'ai un goût prononcé pour les films sur la folie, & on peut dire qu'ici, j'ai été comblé.
Certains pourront penser que l'aspect horreur/action/etc a été délaissé, je leur répondrai simplement que l'aspect gore/psychologique/satirique remplace amplement tout ça, on n'en ressort pas indemne. & je leur dirai aussi que le budget pour ce film a été très limité.
Un coup de coeur.
Satané
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le 17 févr. 2012

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Satané

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