Là, tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté

J'ai toujours trouvé ce vers de Baudelaire chiants à mourir, bourgeois en diable, réactionnaires. Comme lui en somme sous ses airs de faux rebelle. Mais il a ceci de bon pour titrer une critique de Tucker & Dale qu'on ne peut trouver plus antinomique.

Dans ce qui devait être leur havre de paix tout n'est que chaos et atrocités, pauvreté, affres et souffrances. Et au lieu de nous tuer d'ennui tel l'invitation au voyage, les tribulation du duo de rednecks qui espéraient juste rester tranquille chez eux nous plonge dans l'euphorie et le rire. C'est à se demander si Elie Craig et Morgan Jurgenson ne se sont pas précisément inspiré du charlot pour donner la profondeur surprenante de leur survival pas si débile que ça.

Notamment en mettant en exergue que la vraie beauté est à l'opposé de celle dictée par la vision bourgeoise. La beauté est celle du cœur d'un cul terreux et la laideur celle du petit con propre sur lui qui répond aux canons superficiels mais n'a en lui que l'immondice de la bêtise suffisante jusqu'à l'auto destruction, des à priori et de la haine de ce qui ne lui ressemble pas. On y retrouverait presque un des piliers de l'oeuvre de Bret Easton Ellis.

L'ordre véritable est dans l'équilibre naturel que le sadique pouet pouet parisien détestait tant. Jamais elle n'impose de danger. Le danger est dans la connerie humaine. Le luxe pour Tucker et Dale est justement dans la nature, à pêcher depuis une vieille barque loin de tout et surtout de tous. Dès qu'ils sont approchés par la société jeuniste et expansive de leur beau pays le calme est rompu, l'atroce s'enchaîne et la souffrance tuméfie leurs visages. Surtout pour ce pauvre Tucker.


Si j'ai adoré ce film c'est aussi que je suis fan de ce genre soit disant d'horreur mais surtout comique qui a toujours une critique de la société en filigrane et qui parvient à dépasser l'abominable par le rire. Parvenir à ce que le climax de l'atrocité n'aboutisse pas sur des frissons mais sur des rires est une leçon de vie en soi, à l'instar d'un Shaun of the dead ou d'un Severance et de quelques autres.

Au delà de ces réflexions c'est avant tout un divertissement, aucune prise de tête, que du fun. De l'éclate, du rire jubilatoire, de la tendresse aussi, un touche de critique sociale, des acteurs excellents même quand ils campent une caricature de personnage vu et revu... Craig et Jurgenson signent un film sans prétention tout en accomplissant un chef d'oeuvre pop corn, une baffe rafraîchissante.


10 c'est sans doute trop, mais il faut bien compenser des 3 et 4 qu'il ne mérite pas non plus.