Voilà un de ces petits bijoux magiques que le cinéma produit comme par enchantement sans que les créateurs en soient parfaitement conscients. Parce que, ordure que je suis, je subodore que Ramis n'est pas totalement maître des méandres de son joyau. Je n'ai pas l'impression en regardant sa filmographie qu'il soit un artiste ayant démontré une capacité de créer une oeuvre profonde. Pourtant celle-ci l'est, par hasard? par miracle? Je deviens injurieux. Soit!

Cet embriquement du temps dans le temps, cet éternel recommencement est une idée de génie, de ces idées qui échappent à son auteur... voilà que je recommence à être mesquin! une idée qui trotte dans la tête et qui permet un peu... beaucoup comme It's a wonderful life de Capra de construire un personnage en évolution, sur une pente raide.

C'est une oeuvre extrêmement optimiste qu'on nous offre là dans un élan de grâce qui me stupéfie... et allez, j'en rajoute une couche!

Mais merde, comparer Ramis à Capra, ça fait quelque chose!

L'optimisme pourtant ne se révèle pas aussitôt : il faut aller le chercher, très loin, au plus profond de soi, dans le désespoir ultime, au-delà du suicide!
Très belle image, très belle idée : même le suicide devient grotesque, tout comme les gesticulations cyniques de personnage de Murray. A quoi bon?

A quoi bon? Mais à bon Andie voyons!

Et il faudra toute une vie... toutes ses vies à Murray pour s'en apercevoir.

Ce qui reste profondément dérangeant dans ce film c'est que ce processus ne se fait que dans la douleur : une sorte d'enfantement sans césarienne, sans péridurale, au forceps! Enfermé dans sa vie, seul et déprimé, amer et désillusionné dans son monde, comme déjà mort, Murray fait l'apprentissage de la vie parce qu'enfermé dans cette journée. C'est pour échapper à cette aliénation qu'il est obligé d'évoluer. C'est un poisson dans son bocal qui comprend qu'il est poisson dans son bocal. Y a-t-il plus insupportable que de ne pas savoir combien de temps on sera poisson?

En tout cas, la performance de Murray est pour moi, l'une, si ce n'est sa meilleure... après Lost in Translation... je n'ai pas vu toute sa filmo. C'est un acteur exceptionnel. Ma fanitude apporte à ce film au moins 2 points de plus! Il parvient là aussi par magie à donner à son personnage l'humour, la froideur et le désespoir requis passant de l'un à l'autre sans laisser passer une once de désaveu. Cela coule de source. Pûreté du jeu de comédien qui fait mon admiration!
Alligator
9
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le 30 nov. 2012

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Alligator

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