Bayonetta
7.3
Bayonetta

Jeu de Platinum Games, Hideki Kamiya et Sega (2009PlayStation 3)

J'avais beaucoup entendu parler (plutôt en bien) du jeu à sa sortie, sans être vraiment tenté. Quand je l'ai vu en occasion à 12€, je me suis dit que ça devrait valoir le coup... Erreur fatale.
Dès la première 1/2 heure de jeu, j'ai senti qu'on me prenait pour un con.
Mais poussé par l'enfer du devoir, j'ai continué à "jouer" ("souffrir" serait plus approprié), et j'ai même poussé l'obstination (enfin, par "je" j'entends ma chérie et moi) jusqu'à finir le jeu, au bout d'une vingtaine d'heures de supplice. J'avoue que, plus le temps avançait, plus la seule idée d'écrire une critique me poussait à finir le jeu, histoire d'avoir un peu plus de légitimité.


Le gameplay de Bayonetta n'est pas mauvais en soi. C'est du beat avec suffisamment de possibilités de combos, d'ennemis différents, de mini-jeux pour ne pas se montrer trop répétitif (le principal problème habituel du genre). Mais si le système d'esquive (qui permet d'arrêter le temps quelques instants quand effectué au bon moment) permet d'à peu près maitriser le déroulement des combats, le problème est que ceux-si sont la plupart du temps incroyablement brouillons, saturés visuellement (le jeu rame d'ailleurs régulièrement quand il y a trop d'éléments animés à l'écran), avec des "murs invisibles" absurdes de partout et une caméra lente (même quand on modifie sa vitesse à fond) et SYSTÉMATIQUEMENT mal placée. Sans compter les horripilants remix musicaux façon j-pop couvrant les scènes d'action (alors que les musiques d'ambiance religieuse sont par ailleurs pas mal), que j'ai fini par enlever pour mieux entendre attaquer mes ennemis.
Surtout, le problème principal est que pratiquement à chaque fois, je me suis rendu compte que toutes les subtilités que j'essayais de déployer pour battre mes ennemis (esquives, combos, tactiques d'approche...) se révélaient pour la plupart inutiles, vu qu'il suffit bien souvent de matraquer les boutons d'attaque pour gagner un combat de manière plus efficace. On en vient ainsi à privilégier la subtilité uniquement pour avoir un meilleur rang à la fin du niveau, ou pour reposer ses pauvres articulations meurtries... Pauvres perspectives (surtout quand beaucoup d'objets gagnés grâce aux points cumulés se révèlent assez inutiles, ce qui la fout plutôt mal pour une sorcière).
Et s'évertuer à maitriser tous les combos, en principe j'adore ça. Mais si ça n'a qu'une influence minime sur le résultat dans le jeu (rien que visuellement, tout est tellement brouillon...), what's the point? C'est comme jouer une partition de fou à la flûte en plein milieu du tintamarre de l'orchestre du village...


Qu'est-ce qui peut alors motiver à jouer ?
Le scénario ? Si l'idée de contrôler une sorcière dans un monde où s'affrontent les forces de l'ombre et de la lumière, et donc de tabasser des anges et autres personnages pseudo-religieux, est a priori fun, l'histoire justifiant tout ça est d'abord perçue comme à moitié incompréhensible, ensuite comme très embrouillée pour pas grand chose, puis finit par être vue comme totalement inintéressante, caricature d'un mauvais manga.
Les personnages secondaires se révèlent particulièrement agaçants, de leur attitude jusqu'à leur manière de s'exprimer, avec un jeu limite brechtien parfois -- ce qui n'a ici aucun intérêt (et je ne vous parle pas du boss final, qui paaaarrrrlllleeee trrrrrèèèèèès leeeeeeeeeeentemeeeeeeeeeeeeeeent pour se donner un genre).


Déjà que le jeu ne casse pas des briques graphiquement (si ce n'était la profusion des effets visuels -- un des points positifs du jeu, si on aime le psychédélisme --, on croirait jouer à un jeu PS2), avec son mauvais goût assumé, ses animations rigides (à part évidemment quand il s'agit de faire tortiller le cul de Bayonetta, et encore...) et ses personnages inexpressifs (le sex-appeal du Bayonetta en prend un sacré coup d'ailleurs, déjà qu'elle a une morphologie bizarre), les cinématiques sont sûrement le point le plus honteux du jeu : soit elles sont complètement inutiles et vite soûlantes, parce que ne servant qu'à faire effectuer à Bayonetta des actions de taré --impossibles à faire en jouant-- pendant 1/4 d'heure, plus "boooooring" que "awesome!" ; soit elles se révèlent n'être que des... images arrêtées, avec l'effet le plus cheap du monde pour donner une illusion de mouvement : des bandes façon pellicule de cinéma sur le côté. Non seulement ce n'est absolument pas raccord avec l'univers du jeu, mais c'est surtout totalement ridicule !


Je pourrais continuer longtemps sur les défauts du jeu, mais comme je suis sympa je vais un peu dire ce qui était bien : les boss sont souvent complètement absurdes, gigantesques et originaux (plus que la manière de les battre en tout cas, façon sous-God of War), et les "super-attaques" de Bayonetta ont carrément la classe (même si se foutre à poil pour aguicher des anges -- asexués, donc -- est-ce vraiment nécessaire?). Comme je l'ai dit plus haut, y a plein de mini-jeux qui font basculer dans un autre genre (course, shoot...), ce qui est plutôt une bonne idée même si ces moments sont souvent très mal foutus et tombent comme un cheveu sur la soupe (je pense notamment à la course en moto, moment portnawak ultime).
Le jeu est également bourré de références (notamment à d'autres jeux-vidéo), mais elles apparaissent comme un truc gratuit, fan-service pour définitivement emballer l'otaku qui aura probablement acheté le jeu avant tout pour fantasmer.


Au final, Bayonetta pourrait être vu comme un équivalent vidéo-ludique des films de Michael Bay : tout est prévu pour être fun, mais perso il m'en faut beaucoup plus pour m'éclater.
Le grand côté n'importe-quoi du jeu (on parle quand-même d'une sorcière qui a des pistolets en guise de talons aiguilles), qui le fait lorgner du côté d'une "série B à gros budget", aurait donc pu être cool, mais l'ensemble est si mal torché, si mal tourné et si complaisant que non, même pas Branletta.

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le 7 juil. 2012

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youli

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