Life is Strange
7.6
Life is Strange

Jeu de Don't Nod Entertainment et Square Enix (2015PlayStation 4)

La vie n'est pas un long fleuve temporel tranquille.

Dans la famille des jeux narratifs à choix multiples et à faible teneur en gameplay, je voudrais celui avec … l’ado américaine qui peut remonter dans le temps ? Gagné. FAMIIIIIIIIIILLE. Bref. Si l’on connait Quantic Dream ou Telltale Games pour être les deux développeurs qui abreuvent régulièrement ce segment du jeu vidéo, on découvre ici un Dontnod qui délaisse pour un temps la catégorie action-aventure après s’être illustré avec Remember Me, premier jeu du développeur français. A l’instar de Supermassive Games avec son très sympa Until Dawn plus sanguinolent et résolument orienté vers le Teen-Horror Movie, Life is Strange tente de grignoter une part du gâteau avec une proposition plus calme et posée, empreinte d’une bonne dose de Science-Fiction. Etant intéressé par l’aspect choix et conséquences de ces jeux, et profitant de la bonne affaire PS4 du moment (Episode 1 gratuit + Season Pass en promotion pour un jeu complet à bas prix), j’ai voulu voir ce que ce jeu pouvait offrir de différent.


..// PROS aka Maxine et les Maîtres du Temps //..


Le fait de pouvoir jouer avec le continuum espace-temps est agréable car cela permet de tester plusieurs options sans avoir en permanence une épée de Damoclès au-dessus de la tête, ou l’envie de recommencer tout un chapitre. On ne donc peut presque jamais rater le coche, Life is Strange n’ayant pas vocation à mettre le joueur sous pression, bien au contraire. Il le pousse à prendre son temps, farfouiller partout pour interagir avec le moindre objet prévu pour, discuter avec tout le monde et si ça ne se passe pas comme prévu, on rembobine pour voir si la réaction de notre interlocuteur sera réellement différente ou juste cosmétique. Inutile de jouer les scientifiques effarouché(e)s en pointant du doigt le fait qu’en remontant le temps Max ne revient pas à sa position de départ (contrairement au Prince de Perse), ou qu'elle conserve les objets qu'elle vient de mettre dans sa poche, Life is Strange ne s’encombre pas de tentatives d’explications de quoique ce soit, toutes les théories en matière de voyages dans le temps restant à ce jour plus ou moins envisageables, avec absolument aucun moyen d’en vérifier une seule. Pratique.


L’humour et la pléthore de jeux de mots qui ponctuent les 5 épisodes sont un vrai régal. Cela pourrait paraître futile comme appréciation mais dans un jeu à forte connotation narrative, les dialogues ont une place logiquement prépondérante, donnant de l’épaisseur aux personnages, ou pas. Maxine, ou plutôt Max est un prénom qui permet un bon paquet de dérivés, allant du classique « Mad Max », à « MaxGyver strikes again », en passant par du « Bat-Max », « Super-Max », « Maxwell Silver Hammer » (une chanson des Beatles), « Maximus », et j’en passe. Milieu estudiantin aidant, les vannes et jeux de mots fusent de toute part avec les très bons « Fuck Yourselfie », « Release the Kra-can » au distributeur de boissons, « Home shit Home », ou encore une référence à la série Docteur Who via un « Good Evening, « Doctor Hoo » … sorry » lancé à une chouette endormie. Du début à la fin, malgré un scénario traitant de choses relativement graves, le jeu n’oublie pas qu’il met en scène principalement des étudiantes et étudiants en pleine transition vers le monde des adultes, avec tout ce que ça implique. Et même si je n’ai absolument aucune idée de la façon dont parlent ces jeunes de nos jours, ça a largement fait mouche me concernant.


Si l’absence de version française a sans doute posé problème à certains joueurs, la version anglaise ne souffre aucun reproche, avec des acteurs percutant et bien choisis. Les sous-titres en français sont d’ailleurs les bienvenus, car sans pour autant tomber dans la marmelade linguistique avec des accents incompréhensibles (l’Oregon n’est toutefois pas le Texas de ce que j’en sais), certaines expressions ne sont pas des plus courantes, même lorsque l’on utilise l’anglais au quotidien. SquareEnix oblige, le jeu n’a été traduit qu’en japonais, mais je n’ai sincèrement pas envie d’entendre le résultat. A cela s’ajoute une partie musicale très soignée qui contribue grandement à l’ambiance du jeu, prenant parfois la musique d’une chaîne Hi-Fi que l’on vient d’allumer pour nous accompagner par la suite lors de nos pérégrinations. On est ainsi souvent porté par les mélodies paisibles et reposantes du jeu, même si je n'écouterais jamais ce genre de musique en dehors d'un jeu.


..// CONS aka « Ready for the mosh pit, Shaka Brah? » … « Maybe not »//..


Pour un titre qui se veut émotionnel, ponctuellement triste, voir même parfois carrément larmoyant, avec des choix déchirant qui résonnent sans doute dans la réalité de certains joueurs, les expressions corporelles et faciales se doivent d’être au top. C’est hélas très loin d’être le cas, avec une synchronisation labiale médiocre, des visages trop figés, et un manque de variations flagrant dans les animations génériques. Tous les personnages ont par exemple cette manie de se gratter le pif ou la joue de la même manière, se tenir en gros de la même manière, et bouger un peu de la même manière. En résulte des caractères certes différents, mais une uniformisation de l’ensemble qui casse régulièrement la personnalité des divers protagonistes. On est donc loin de ce que propose la "Top Hi-Tech" concurrence avec ici un niveau technique trop perfectible, et donc un rendu bien moins crédible.


Pour faire court, je n’aime pas les séries télés pour plusieurs raisons. Il faut attendre l’épisode suivant, elles trainent en longueur, et s’étalent sur des mois et des mois avec leurs saisons dont on ne sait pas toujours si ça sera la dernière ou pas. Dans le même esprit, je n’aime pas non plus les jeux à épisodes. Donc j’ai évité Life is Strange à sa sortie et j’ai bien fait. Les épisodes durent en moyenne 2h, soit une durée de vie totale de 10h, à multiplier par le nombre de fois que vous souhaiterez refaire le jeu (3 pour ma part), afin de tester d’autres choix et en apprécier les conséquences. Sauf que 2h c’est trop court surtout quand on finit sur un cliffhanger. Pris dans son ensemble, le jeu m’a réellement plu. Découpé en morceaux, j’aurais sans doute eu envie d’étrangler l’éditeur, les développeurs, le chat du voisin et ce facteur qu’on aime tant, surtout celui qui préfère mettre un avis de passage que de sonner. On a évité le pire donc. Ouf.


Les jeux à choix multiples restent enfermés dans un format réducteur qui laisse finalement une liberté très relative aux joueurs. S’appuyant sur des scénarios qui veulent absolument nous emmener de M à X en passant par A (si c'est possible, en remontant le temps de l'alphabet), ils ne se risquent pas à tordre complètement le cou de leur histoire avec des issues qui pourraient être complètement différentes. Si un personnage peut éventuellement être amené à mourir en cours de route, ou que vous soyez la pire des raclures, vous obtiendrez en général toujours le même résultat, avec des variantes narratives qui sont compensées par d’autres variantes, afin d’être sûr de toujours rester sur la même autoroute, peu importe le nombre de fois que vous avez changé de voie. Life is Strange ne déroge donc pas à cette règle, et quoique vous fassiez, vous finirez toujours par arriver au même péage. Compréhensible mais très classique pour le coup.


..// CONCLUSION //..


Exercice surprenant de la part d’un développeur dont le premier jeu d’action-aventure ne pouvait laisser présager une réorientation vers le genre Série Interactive, Life is Strange réussit à captiver avec son design de machine humaine à remonter le temps, tout autant qu’il déçoit pour sa technique bancale qui ne met pas du tout en valeur ses différents personnages. Si toutefois vous êtes un adepte du genre, Life is Strange devrait vous plaire et vous faire passer un agréable moment hors du temps, et ce d’autant plus que tous les épisodes sont à présent disponibles. Il faudra toutefois passer outre une absence totale d'action ou de prise de risques, le jeu roulant sur les rails de la sérénité et de la décontraction.

Dark_Inquisitor
7
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le 3 août 2016

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Dark_Inquisitor

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