Satoru Iwata l’a dit : 2013 sera l’année Luigi. Le frangin vert s’émancipe et ce second opus de ses aventures hantées pourrait déjà être son meilleur moment.
Chez les fans de Nintendo, la nouveauté est toujours quelque chose de relatif. Big N a la conviction que c’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure tambouille, conviction renforcée par les chiffres de vente. On peut le lui reprocher, en avoir marre de sauter sur des tortues ou de secourir Zelda et apprendre qu’être un héros c’est quand même pas facile tous les jours entre force, sagesse et courage. Nintendo est cet artisan qui fabrique inlassablement la même chaise mais d’un, on est très bien assis, merci, et de deux, la subtilité de fabrication échappe souvent à des regards trop pressés.
Luigi’s Mansion est un cas un peu à part, un îlot encore peu visité par les joueurs, la faute à un premier épisode Gamecube rafraîchissant certes mais pas très long en bouche. Revoir Luigi et ses ectoplasmes pour une seconde visite avait donc, à l’échelle de Nintendo, un goût de nouveauté avant de confronter au temps qui passe et qui bégaie les nouvelles mécaniques d’un Mario 3D, d’un Zelda ou d’un Mario Kart.
Les canadiens de Next Level Games, aidés des équipes de Miyamoto, n’ont pas fait les choses à moitié et ont transformé l’amuse-gueule du premier opus en repas pantagruélique : solo d’une quinzaine d’heures divisé en 5 manoirs, gemmes bien planquées, Boos à débusquer, boss inspirés, upgrades d’équipement, système de scoring, multi local et online. Depuis l’épuisant Kid Icarus, difficile de trouver jeu portable plus complet.
La construction du jeu aura d’ailleurs ses détracteurs. Luigi’s Mansion 2 a clairement le cul entre deux chaises : ni vraiment expérience portable (certaines missions dépassent les 45 minutes), ni tout à fait expérience de salon avec son découpage en missions et ses retours obligatoires chez le professeur K. Tastroff, avant télépixelisation dans un autre endroit du manoir. Le procédé lasse un peu alors que les mécaniques de jeu ne rouillent jamais. 5 manoirs ouverts avec des points de sauvegarde auraient sans doute rendu la digestion plus facile, même si on se doute que Nintendo et Next Level Games ont privilégié la replay value. Question de choix…
Pour le reste, Luigi Mansion 2 réalise un sans faute. Il s’y dégage une drôlerie, une bonne humeur et un plaisir jamais très éloignés des premières aventures de Mickey. On aurait très bien vu la souris de Disney arpenter les pièces des manoirs, lampe torche à la main, accompagnée du fidèle Pluto et tourmentée par ces ectoplasmes joueurs et railleurs. Les animations tordantes de Luigi, sa frousse jamais très sérieuse, ses mimiques et ses expressions, sa façon de siffloter une musique pour se rassurer ou l’espièglerie des fantômes rappellent le meilleur de Disney.
Cette DA inspirée s’appuie sur un level design malin et un game design sans faille. Si le jeu est plutôt facile, trouver tous les secrets est une autre histoire : des gemmes cachées aux pièces, billets et lingots disséminés derrière des mécanismes, en passant par les Boos qu’il faudra découvrir grâce au Révéloscope, le jeu, comme souvent chez Nintendo, récompense le joueur curieux et inventif.
L’absence de second stick aurait pu être problématique, il n’en est rien. Au contraire d’un Kid Icarus, le rythme du jeu est en parfaite adéquation avec l’ergonomie de la 3DS. On aspire avec R, on souffle avec L, 2 boutons servent pour la torche et le Révéloscope quand 2 autres permettent d’orienter aspirateur et torche en haut ou en bas. Bien pensé et jamais handicapant même dans une pièce remplie de fantômes.
Attendu depuis le lancement de la 3DS, Luigi’s Mansion 2 est un indispensable qui comble toutes les attentes placées en lui. Complet, attachant et inspiré de bout en bout, il illustre à merveille le concept de plaisir vidéoludique, cher à Nintendo. Une maison hantée pour rire et frissonner dont la visite est pour une fois bien plus longue que l’attente pour y entrer.
2013, l’année Luigi et sans aucun doute l’année de la 3DS.