" et c'est une histoire qui va peur-être t'ennuyer mais tu n'es pas obligé d'écouter, elle m'a dit, parce qu'elle avait toujours su que ça se passerait comme ça, et c'était sa première année ou plutôt, croyait-elle, son premier week-end, en fait un vendredi de septembre à Camden [...] "

Liberals Arts College de Camden, Nouvelle-Angleterre des années 80. Bret Easton Ellis pose ses personnages récurrents et satellitaires, gravitant autour de récits cinématographiques à la Dystopie marketée et assumée ; et qui s'entrecroisent dans un foutoir nuageux fait d'incompréhensions et d'utilisations. Tout ça accessoirisé par des cassettes des Smiths et autres influences Pop Rock anglaises inondant les radios de l'époque.
Les narrateurs se suivent, étudiants de façade, vaguement Arty, aux urgences et aux ressentis existentiels sur-joués, sur-vécus, un Way of Life de Yuppies ego centrés et auto-suffisants, en déséquilibre permanent ; mais sous caution "bonne famille" tendance classe-moyenne-haut-du-panier-et-sur-indexée.
La phraséologie de Bret Easton Ellis, à l'oralité travaillée, témoigne d'une époque aux dérives cotonneuses et amnésiques ; un moment et un lieu, quasi hors du temps, où tout semble permis et où les codes sont réadaptés, débridés, en vue d'une totale et impitoyable liberté d'action. Des personnages, leur(s) identité(s) et leur complexité, leurs besoins, leurs excitations creuses mais romantiques, leur recherche permanente de plaisirs (si possible sans lendemain) ; au travers de sexualités ouvertes, faites d'expériences lisses, tremblantes, primaires et fiévreuses, avec option Puritanisme décadent et maquillé d'ambivalences sexuelles assumées. Tout se passe alors dans une Party Prêt-à-Baiser, une piaule d'étudiant au coturne définitivement absent ou bien, finalement, dans des Pubs comme l'Enfer ou le Carousel et son juke-box vomissant. S'ensuit un alignement d'abandons entrecroisés, aux vides pâteux façon Nevermind Sex Drugs and Rock'n'roll, débouchant invariablement et avec délice sur des impasses, des gueules de bois, des manques (recherchés ?) comme moteurs bancals d'une vie à la fragilité glamour d'un rêve désespéré.
Ça sent le trompe-l'ennui, la descente aux enfers, les personnages froids, vicieux et détachés, calculateurs et artificiellement adaptés. La langue de l'auteur de Moins que zéro, rapide et directe, donne tout son élan, son vertige, à ces micro-histoires et permet très facilement de se laisser-aller dans cette dérive consciente. Il fait appel à tout un ressenti physique, culturel, des moments vécus, des douleurs, des odeurs, des désirs et des envies, inassouvis ou non, alors on y va...de toute façon y'a que ça, juste ça.

_Julien Bitaud-------Consultant en Image &&&_
http://julienbitaud.blogspot.com
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le 9 nov. 2012

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