Neuromancien
6.9
Neuromancien

livre de William Gibson (1984)

A lire ce livre, on ne peut qu'être frappé de l'influence qu'il a eue sur tout ce qui vient ensuite. Un livre étonnemment précoce (1984 !).

L'univers de Gibson n'est pas un univers ultraviolent, au sens où il y a peu de gore. Mais l'atmosphère maladive, quoiqu'énergique qui s'en dégage est à bien des égards fascinante.

La représentation de la matrice, univers virtuel en 3D, a un peu vieilli, puisqu'au niveau visuel, les capacités de nos ordinateurs sont sans commune mesure avec ce qu'on pouvait imaginer à l'époque. Il n'empêche qu'on sent derrière les trouvailles de Gibson ce qu'était le milieu de la programmation à l'époque, et bien des pistes intéressantes sont ouvertes dans ce livre.

La violence se situe bien plus au niveau social : grandes compagnies, mercenaires aux prothèses cyborgs dérangeantes, manipulation des images, réflexion sur la vérité, impossibilité de s'identifier aux personnages individualistes et parfois presque autistes, réflexions sur la pollution, l'aliénation due à la machine... Ce livre est d'un tel foisonnement qu'on peut ouvrir une page au hasard pour y piocher au moins une idée originale et/ou fondatrice.

Les personnages sont savoureux, du barman de Chiba à la Japonaise aux lames rétractiles, en passant par le rasta de l'espace qui assure, les agents de sécurité français et bien sûr le très charismatique - quoique fort absent - Armitage. Cela dit, les personnages cèdent le pas devant les décors et l'univers, foisonnant et riche.

L'histoire est volontairement difficile à suivre, quoique la narration soit linéaire et exclusivement centrée sur le personnage central de Case. Elle ne repose pas tant sur un vrai suspense que sur une paranoïa ambiante vis-à-vis de ce qu'on croit qu'il se passe. Un peu comme dans les BD de Masamune Shirow (je pense notamment à Apple Seed), on ne comprend souvent qu'après-coup l'action qui s'est déroulée.

L'écriture n'est pas exclusivement tournée vers l'action, mais ménage des plages que je n'ose pas qualifier de contemplatives : poétique serait plutôt le mot, s'il est permis de faire de la poésie à partir d'un environnement synthétique. Certains éléments sont même assez psychédéliques, comme la virée virtuelle sur la plage : on pense à Philip K. Dick, avec une ambition littéraire supérieure (Dick subordonnait tout à sa narration, parfois au détriment du style).

Enorme influence dans les films et les jeux vidéos ; je pense notamment à Shadowrun sur SNES, qui suit une trame assez similaire.

Allez, j'étais parti sur 8/10 mais le bouquin vaut largement les 9.
zardoz6704
9
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le 4 juin 2012

Critique lue 857 fois

3 j'aime

zardoz6704

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