Arts martiens
6.6
Arts martiens

Album de IAM (2013)

Comme j'attendais particulièrement cet album, j'ai décidé de m'immerger complètement dans l'univers d'IAM et d'écrire une critique à chaud, sans consulter les vôtres. J'y jetterai un oeil après avoir posté la mienne, me faisant regretter ou pas ma note.

Donc pour être tout à fait honnête je commencerai par dire que je suis un très grand fan du mythique groupe marseillais, et c'est pour cette raison que j'attendais ce nouvel opus avec tant d'impatience. Avant même d'avoir écouté la moindre parole, les infos glanées sur l'album m'avaient mis l'eau à la bouche : une très belle pochette, et des titres de morceaux qui évoquaient déjà à eux seuls la poétique d'IAM. Mes attentes étaient donc assez élevées.

Le premier son, intitulé "Spartiate Spirit", avait déjà pour lui un titre alléchant. L'instru ponctuée de cris guerriers et de bruits d'épées qui s'entrechoquent me plait particulièrement, et le texte mettant en relief la carrière du groupe est plaisant. "Putain le rap mais qu'est-ce qu'ils l'ont aimé", tout est dit. "Debout les braves" est dans la même veine, et je me demande même si c'était vraiment nécessaire de faire deux titres pour des résultats si similaires.
Vient ensuite "Les Raisons de la colère", où Shurik'N est particulièrement bon, et se rachète ainsi d'emblée pour son deuxième opus solo qui avait été une triste déception pour moi. Pris dans son élan, l'oncle Shu envoie du lourd sur "Tous les Saints de la Terre", se délectant du rythme entrainant. AKH fait le boulot et il en ressort une chanson sympa. "La Part du démon" est selon moi la première fausse note du projet. Le sujet est bon mais musicalement ce titre est plus qu'oubliable : mauvais refrain à base de scratchs, flow agaçant, beat plus que redondant… Presque difficile d'aller au bout. Heureusement pour mes oreilles le morceau suivant amène une excellente nouvelle : le retour d'une instrumentale à consonance asiatique, comme j'ai toujours adoré. Sur "Où je vis" Shurik'n avait atteint une sorte de perfection dans le genre de poser de purs textes sur ce type de beat. Avec tout un tas de métaphores le groupe revient une nouvelle fois sur leur carrière si riche. La poétique des samuraïs de l'école du micro d'argent me donne envie de chausser des sandales et d'aller méditer sous un cerisier en fleur. Excellent morceau, que je mettrai donc à côté du "Style de l'homme libre", que j'avais particulièrement apprécié sur "Saison 5". Vient ensuite "4.2.1.", et c'est peut-être la meilleure prod de l'album. Vraiment, la boucle est terrible. Il faut ajouter à ça un texte de qualité et un bon refrain, et puis nous avons là une bonne chanson. Pas dingue, mais bonne. En ce qui concerne "Misère", je qualifierais le morceau de "touchant". Les premières notes de piano ainsi que Shurik'N qui débute en parlant installent une atmosphère qui m'a rappelé les films en noir et blanc se déroulant dans des coins sordides. "Notre Dame veille" est semblable dans le sujet, nous plongeant dans l'atmosphère sale et sombre de Marseille la nuit. Mais ce-dernier est bien trop court pour vraiment être appréciable.
Avec Marvel les deux MC s'offrent un délire super-héros plutôt jouissif, avec en fond des bruitages "cosmiques". Pourquoi pas ? Avec "L'Amour qu'on me donne" voici Saïd de retour au refrain. Morceau agréable, sans plus. Nous retrouvons une autre instrumentale asiatique pour le titre "Habitude". Le sujet est intéressant et traité avec humanité, et cela donne une chanson qui typiquement est là pour meubler la tracklist d'un album. Ce ne sera jamais un tube mais ça a du sens, c'est posé…
En ce qui concerne "Mon encre si amère", je ne suis pas vraiment fan de l'instru. Pour le texte, comme AKH le dit dans ladite chanson, "dans le banal on nage"… À noter tout de même la petite référence "on reste coincés au milieu des cactus" placée dans le refrain. "Après la fête" a réussi l'exploit de me rendre nostalgique. "Ils sont bien loin ces samedi au parfum acidulé", comme d'habitude les deux patrons du Rap français parviennent à exprimer un sentiment que chacun connait avec poésie et émotion. Tout le monde sait "qu'après la fête, tout s'estompe"… Passons à "Pain au chocolat" : début insupportable, et sujet dont je me fous royalement. Dommage, car la production est terrible. Je n'ai pas grand chose non plus à dire au sujet de "Dernier coups d'éclat", qui aurait pu être excellent, mais finalement me laisse assez indifférent.
Enfin, "Sombres manœuvres". Je l'ai gardé pour la fin car c'est mon titre préféré de l'album. Déjà j'ai toujours adoré les chanson "symétriques", et celle-ci évoque ce que j'ai toujours eu du mal à encaisser dans les films de gangsters. Comment des personnes qui ont grandi ensemble arrivent à s'entre-tuer pour des raisons quelconques ? Le souvenir qui me vient immédiatement est celui de ce pauvre Wallace dans la première saison de The Wire, qui se fait abattre sans remords par ses deux meilleurs amis. IAM dépeint merveilleusement bien ces situations de tension et de soupçons, avec le dénouement inévitable que l'on connait d'avance. Dans le genre story telling, cette chanson est l'une de celles qui m'ont le plus séduit. De plus la prod est encore aux sonorités asiatiques, rajoutant un imaginaire yakusa.
Donc pour résumer je dirai simplement qu'Arts Martiens est un bon album. Ce ne sera jamais un classique, mais ça reste d'une qualité bien supérieure que beaucoup de projets qui sortent de nos jours. Et c'est très loin de l'album commun d'AKH et Faf La Rage, ainsi que du dernier opus solo de Shurik'N, qui sont tous les deux franchement oubliables. Mais lorsque Chill et Shu sont réunis, la qualité est très souvent au rendez-vous. À part Médine, je ne vois pas de rappeurs français qui soient aussi doués que nos papas marseillais pour raconter des histoires. Alors même si je n'ai pas trouvé dans cet album d'équivalent à "Demain c'est loin", "La Fin de leur monde" ou encore "Manifeste", j'ai passé un bon moment à décortiquer les paroles et une poignée de ces nouvelles chansons viendront rejoindre mon best of personnel du groupe.
Lardon
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le 30 avr. 2013

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Lardon

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