L'année 2020 aura paradoxalement été riche pour King Gizzard. En effet, dès le mois de janvier on a eu 3 lives (Live in Paris '19, Live in Adelaide '19 et surtout Live in Brussels '19 qui est mon petit coup de cœur), disponible uniquement en numérique sur Bandcamp et publiés pour aider des assos quand cela concernait les incendies en Australie. En avril c'est le live "prévu" Chunky Shrapnel qui retrace plusieurs concerts en Europe la même année, et malheureusement un peu fade après qu'on ait eu les autres. Cette fois, en septembre , un double disque de démos sobrement intitulé Demos Vol. 1 + Vol. 2 que je n'ai pas écouté donc je ne vous dirai rien dessus. Encore un live en octobre avec Live in Asheville '19, correct mais c'est un peu la même chose que ce qu'on a déjà eu, en moins bien. Enfin, un dernier live Live in San Fransisco '16 que je n'ai pas eu le temps d'écouter non plus, mais vu ce concert réalisé la même année avec un tracklist similaire, je pense que c'est très très bien. On a également eu la composition du groupe qui a changé puisque un des deux batteurs Eric Moore a décidé de quitter le groupe, pour s'occuper davantage sur leur label Flightless, même si artistiquement ça ne risque pas de changer grand chose, il n'y a qu'à voir les crédits de Paper Mâché Dream Balloon pour s'en rendre compte.


Enfin, tout cette longue intro pour dire que malgré 6 sorties d'album (!!) le septuor devenu sextet n'avait rien sorti d'original depuis l'album thrash metal Infest the Rats' Nest, plutôt bien accueilli chez les fans du groupe, et qui connut un certain succès populaire. Mais voilà que sort un album presque éponyme, à se demander quels nouveaux genres musicaux ils allaient maintenant exploiter.


Et bien, pas grand chose de nouveau puisqu'on retourne dans le monde des microtonales. N'empêche que ça n'en faisait pas une mauvaise nouvelle pour autant : Flying Microtonal Banana fait partie des albums les plus appréciés, et une suite était longtemps espéré à la vue d'un discret "volume 1" sur la pochette. Et si FMB était surtout axé sur du garage orientalisé (avec des petits coucous vers des sons un peu groove), K.G. allait être encore plus large et exploiter plus de genres, tout en gardant le côté oriental lié à ces saintes microtonales.


Mais c'est là que ça tique : le nouvel album se retrouve bien moins inspiré que son prédécesseur. Parmi les morceaux les plus classiques (grosso modo les trois premières, mais aussi Oddlife), on ressent énormément le côté déjà-vu de FMB, mais en bien moins passionnant, les microtonales étant redevenues un gimmick. Ce sont des morceaux que j'aurais peut-être adoré venant d'un autre groupe (voir même si ils se trouvaient sur FMB), mais ici ils paraissent tellement conventionnels.


On notera aussi des styles plus… inattendus, mais c'est pas forcément une bonne chose. Je pense évidemment à Intrasport, une sorte EDM orientalisé (sans déconner, on dirait une mauvaise parodie d'Altin Gün, la boîte à rythme en conclusion c'est un peu le supplice final de la piste). Quant au final The Hungry Wolf of Fate, qui tire dans le doom metal, il est beaucoup trop long pour la qualité du morceau (la faute à un refrain clairement pas terrible, qui plus est répété 3-4 fois), et puis c'est également l'abus de la pédale wahwah, on comprend rien. Je sais bien que c'est la philosophie du groupe de vouloir partager un max de choses, mais quand même, c'est un sacré bordel qui aurait pu être laissé dans les démos.


C'est également un autre problème de l'album : c'est le bordel. En ce qui me concerne, ça ne se rapporte étrangement qu'à ce groupe, mais j'accroche moins quand les styles musicaux partent dans tous les sens. C'est un problème que j'ai également avec Gumboot Soup, malgré les grandes qualités des chansons individuellement. Et le côté je-relie-toutes-mes-chansons-par-un-fil-conducteur-peu-solide n'arrange rien. Je n'en étais déjà pas fan dans FMB (car ça forçait des transitions qui ne marchaient quasiment jamais), mais ici c'est si peu naturel… Je me dis que c'est peut-être dû au "nombreux" auteurs -là où jusqu'en 2016 Stu Mackenzie était le quasi seul compositeur- dont la plupart des morceaux ont qui plus est été écrits lors du confinement, c'est-à-dire coupé des intentions des autres. Mais je ne crois pas, les album de 2017 et après prouvent bien qu'on peut avoir plusieurs auteurs et tout de même être cohérent.


Mais bon, je remarque que je suis hyper sévère avec l'album alors qu'il n'est pas aussi déplaisant ! Parlons des bonnes pistes comme Some of Us/Ontology dont la transition est hyper efficace (quel sacrilège d'avoir fait la pause à ce moment-là sur la version vinyle !) et c'est clairement le moment fort de l'album, et cette montée chromatique hyper rythmée se fait hyper bien en suite d'un morceau comme Some of Us, correct. Et également, il faut souligner la très sympathique Honey folk qui nous rappelle le trop peu joué Paper Mâché Dream Balloon, et qui vient faire une pause bienvenue dans ces rythmiques omniprésentes. Comme quoi, c'est les recettes les plus simples qui marchent le mieux.


Comme d'habitude, je m'attarde plus souvent sur les points négatifs. Si K.G. est un album sympathique, il souffre de sa comparaison avec le reste de l'immense discographie du groupe, et est malheureusement un peu scolaire et bordélique. Il nous présente des choses qu'on a déjà entendues, mais galère à apporter un renouveau vraiment intéressant. Étant déjà une redite, je crains qu'il ne devienne un album anecdotique malgré quelques (très) bons morceaux, au même niveau que 12 Bar BruiseOddments, qui étaient aussi un peu bordélique, mais eux ont l'excuse d'être des albums du début.

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le 30 nov. 2020

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