Nouveau chapitre dans la saga des Beatles pour les retardataires des Sgt. Peppers. Avant toute chose, il est nécessaire de préciser que je parle bien ici de l'EP avec la volonté de faire semblant d'ignorer la parution de la version américaine. Non pas que je n'aime pas cette-dernière, au contraire, mais je pense qu'il s'agit de deux objets différents. Et, étrangement, je trouve que la version américaine est justement la bonne version, car elle comble les défauts de l'EP Magical Mystery Tour.


Nous sommes donc à la fin de l'année 1967, ils ont pulvérisé le monde il y a quelque mois avec l'album du Summer of Love : Sgt. Pepper's Lonely Hearts Club Band. Ce disque d'une génération (qui musicalement m'a déplu par plusieurs aspects cela dit) trouve dans ce court EP un successeur.
Si je pense que l'album est plus intéressant que l'EP c'est que l'album présente un contexte général et non un travail précis qui permet de saisir le dépassement de l'album au stade période. L'EP, lui, est un travail, pas grandiose au demeurant, des Beatles. Un travail conçu comme un réel morceau de la légende, un morceau à part.


Et qu'est concrètement l'EP Magical Mystery Tour ? La bande-son du dernier film des Beatles. Un double-EP étrange qui ne contient que six pistes. On va se permettre une petite analyse morceau par morceau donc.
Le titre éponyme ouvre l'album et a la lourde tâche de justifier tout le projet. Cela dit, c'est plutôt une introduction réussie tant nous sommes entièrement dedans et plein de vie. Cela grâce à un jeu de batterie plein de vie là où les autres sont plus dans la douceur. La ligne de chant est réussie et parvient vite à séduire. On se dit donc qu'on va passer plutôt un bon moment. Il faut dire aussi que le travail sur les échos, les sons derrières, les arrangements font clairement penser à Sgt. Peppers (enregistré pendant, il faut le dire).
On a ensuite You Mother should know dont les paroles sont très léchées. McCartney prend ici sa plus belle plume. Le titre est là encore proche de Sgt. Peppers même si j'y retrouve des petits accents de Revolver. Pas incroyable du tout, le morceau lorgne vers le swing des années 20 sans pour autant réussir, selon moi, à s'assumer. Il reste trop proche de la formule standard des Beatles pour gagner en âme. Problème : sans être mauvais il s'agit presque d'un remplissage et c'est fortement dommage.
Arrive alors la face B du premier disque avec I am the Walrus. Bien que Lennon écrive un titre totalement psychédélique et fou, chaque phrase prise à part est magnifique. Je pense que John le savait tant c'est beau. On ne peut qu'être marqué par la beauté de la composition, on arrive dans une simplification chère à Lennon, car une simplification qui permet de transmettre toute une subtilité sans jamais tomber dans le simpliste. Musicalement c'est très beau, et dans le son général on embrasse le psychédélique. Le chant de Lennon est incontestablement grandiose, les arrangements sont tous aussi séduisants et l'accompagnent parfaitement. Toute la phase de pont avec plein d'enregistrement est également très intéressante, loufoque mais très bonne.
I am the Walrus est un beau, un très beau moment musical pour les Beatles !


On passe alors au second disque, avec The Fool on the Hill où McCartney aurait pu tenter de nous endormir, il n'aurait pas mieux fait. Mettant fortement en avant l'accompagnement flute/chant, je ne peux m'empêcher de penser à She's leaving Home pour l'ambiance globale. Mais de manière nettement moins réussie. Même le pont, se voulant différent face au reste du morceau est finalement passé à côté de ce qu'il pouvait être. Paul se loupe ici.
Flying, seul morceau instrumental devrait avoir la lourde tâche de nous faire oublier ce moment. Et bien on peut le dire : oubliable. Le titre n'a aucune particularité et offre un travail qui, bien qu'intéressant au studio, n'a qu'un résultat médiocre. Musique d’ascenseur tout au plus, Flying est d'autant plus décevant que ce caractère unique dans le monde des Beatles aurait dû lui permettre d'atteindre un nouveau statut. Or, ce ne fut pas tenté du tout. Les conditions étaient là pour un titre révolutionnaire. Dommage que ce n'ait pas été le cas.
La dernière face se montre avec Blue Jay Way. Ce morceau embrasse le côté psychédélique mais aussi indien des Beatles et on ne s'étonnera pas de le voir écrit par Harrison. Bien qu'un peu lent à se lancer et presque hésitant, on a ensuite le droit à une belle ode à la musique indienne reliée au psychédélique. Le tout porté par un Ringo en grande forme derrière sa batterie. Encore une fois le talent de Harrison éclate. Malheureusement l'EP se termine sur un morceau particulièrement doux et calme, qui manque de folie et de puissance, surtout au vu de celle présente dans la batterie.


Que possède-t-on à la fin ? Deux disques très différents dont un second plutôt médiocre. Malgré l'inspiration de Blue Jay Way, ce disque là est très mou et est une sorte d'attente pour une suite qui ne vient pas. On est dans l'attente sans rien. Globalement d'ailleurs, l'EP manque de ce grain de folie, d'énervement, de rock en sommes. Seul Lennon a encore la volonté de se lâcher avec son magnifique I am the Walrus. Le premier disque est d'ailleurs beaucoup plus réussie avec un lancement charismatique et une seconde piste, si elle n'est pas incroyable, au moins réussie.
Malheureusement, ça laisse trois bonnes pistes sur les six au total, dont une face nulle et non-avenue. Ca laisse pas mal de déception surtout, une référence molle aux années 20 et un instrumental sans grandeur.
En sommes l'EP Magical Mystery Tour ne manque pas tant de l'âme des Beatles dans son ambiance que dans sa volonté, ce disque manque encore de ce fabuleux grain de folie des quatre britanniques.


Heureusement, la transformation, réussie en album permettra d'y voir plus claire.

mavhoc
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le 6 févr. 2016

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