No Line on the Horizon
5.6
No Line on the Horizon

Album de U2 (2009)

Vois-tu, cet album, c'est l'histoire d'un enfant devenu adulte qui retrouve son âme d'enfant, moi.


Depuis plus de quarante ans, ce groupe fait du rock en utilisant les ressorts de la pop , du rock épique, et s'est essayé à des tas de choses durant toutes ces années et a fini par drainer autant de fans que de détracteurs. Et en fait, je pense qu'au fond, U2 a toujours fait simplement des chansons pop...


Des chansons !


avec des couplets, des refrains, des thèmes chantés. Basiquement, c'est ça, depuis Boy en 1980. Alors il faut être honnête et savoir dans quelle catégorie on boxe. Il ne te viendrait par exemple jamais à l'idée de dire d'un album de trash qu'il est trop bruyant, n'est-ce pas ? Ici, la catégorie, on ne va pas se mentir, c'est de la Pop (rock) music. Tout simplement. Donc il faut écouter cet album comme un album de pop avec des chansons. Voilà tout. Et pourtant, ils feront plusieurs tentatives d'explorations sonores assez risquées avec Pop et Zooropa, réussi et arty avec Achtung baby, ou s'aventureront dans les racines du blues avec Rattle & Hum et Joshua tree.


Rappelle-toi aussi que ces mecs font des chansons populaires, taillées pour être chantées en chœur, un peu comme des gospels, des chansons qui rassemblent, qu'on fredonne ensemble, la larme à l’œil, la foi, l'amour en bandoulière, la main dans le slip, les cheveux au vent, une main en l'air, et l'autre dans le soutif de sa voisine : non, on ne défaillira pas, on ne se laissera pas engloutir, on ne partira pas en cacahuètes... ce feu est en nous, inoubliable.
Alors s'il-te-plait, un peu de respect pour ce groupe, prends le miroir le plus proche, ou ta canette de bière, et regarde-toi dedans, si tu ne comprends toujours pas ce que je veux te dire.



La filiation entre The unforgettable fire et No line on the horizon est évidente



Mais forcément, tu n'étais probablement pas là en 1985, le vinyl violet et gris entre les mains, difficile de faire le lien, hein. Et si tu y étais, peut-être fais-tu partie des gens pour qui "U2 c'était mieux avant", auquel cas : passe ton chemin. Peut-être que ta vie aussi c'était mieux avant...


Pourtant, ces deux albums sont produits par Brian Eno et Daniel Lanois. Ils vont s'attacher à envelopper U2 dans des ambiances flottantes, des rêveries, à construire des cathédrale sonores englouties. Il y a comme une forme de magie, de passion dans le son, et quelque chose de plus intense et profond qui se réveillera en moi en 2009, 24 ans après.



C'est un peu comme si l'adolescent reconnaissait à nouveau ce feu qui fût. C'est aussi un peu comme si U2 se retrouvait...(et que je reconnaissais qu'ils se retrouvaient...enfin tu me suis ?)



U2, c'est un peu moi, un peu toi, un peu nous, même, avec nos espoirs, nos déceptions, nos révoltes, nos craquages, nos faiblesses, nos réussites, et nos ratages.




1985 : le feu inoubliable



J'avais 13 ans, les écouteurs en permanence sur les oreilles, plongé dans ces paysages musicaux, ces effets sonores, cette guitare planante, ces chansons épiques, puis d'autres plus introspectives. J'étais peut-être déjà autiste, qui sait.
On était en voyage scolaire en Allemagne. Je me rappelle avoir tendu les écouteurs à Herr Salenson. Je ne voyais pas bien ce qu'il faisait là, il avait dû nous accompagner, car en ce temps oublié, vaporeux, e-vaporeux, c'était sa femme qui nous apprenait à nous asseoir et à nous lever dans la langue de Goethe et de Rammstein.
Lui, allait, plus tard, nous emmener plus dans l'historique ville de Berlin avec son funeste mur encore debout...et la ville mythique de Bowie, Reed, Depeche Mode, Einstürzende Neubauten, U2 et du studio Hansa !
Je lui avais tendu le casque du "Walkman" (ancêtre du lecteur mp3), afin qu'il découvre cette merveille de raffinement avec ses notes éthérées. Il prit une minute, poliment, puis me rendit le "chef d'oeuvre" en me disant que c'était joli, mais qu'il écoutait plus volontiers de la musique classique.
Je me sentis meurtris. C'est vrai je n'avais pas choisi le titre le plus représentatif, 4th of July, mais je voulais lui partager ce qui suivait : le passionnel, l'épique, le jouissif "Bad", je voulais le voir danser, savourer cet instant cathartique avec moi, qu'enfin on se comprenne, être à l'unisson avec lui, dans un cri de joie, dans une émanation de nos passions... (Leidenschaft en Allemand, de "leiden", qui veut dire...souffrir, soit la passion qui fait souffrir. Ils sont forts ces Allemands).


Cet album, pour moi, c'était une immersion, avec de l'étrange ("Elvis Presley and America"), des titres puissants ("Wire", "Indian summer sky"), des titres atmosphériques ("MLK", "4th of July", "Promenade"), des titres épiques ("Pride", "Bad", "The unforgettable fire") et ce titre inoubliable, qui résumait tout mon amour d'alors pour ce groupe : "A sort of homecoming"...


Oh come away oh come away, oh come away, I say I....



2009 : A sort of homecoming




Une fois chez moi, je retrouve ce truc qui m'avait fait aimer un jour U2.



J'écoute.
L'ouverture est grandiose, la sonorité, l'esprit me plait, et surtout : la passion


J'ai 37 ans, et tout d'un coup c'est comme si j'en avais 13.
"No line on the horizon", et je décolle.



"Unknown caller", frais comme un matin...on y est : la guitare typique de The Edge, le jeu sur les toms typique de Larry Mullen Jr, et puis ce refrain, les bras écartés à faire des "oh-oh-oh" à tue-tête. J'en ai des larmes aux yeux.



Les chansons épiques, le temps qui passe, tout revient tout d'un coup en pleine face, les rêves, les pleurs, on retrouve son cœur adolescent. Merde, qu'est-ce qui a pu bien se passer durant toutes ces années ?!!



I go crazy if I don't go crazy tonight...


Et puis surtout, on retrouve ce son si typique, une unité sonore et une émotion palpable : il suffit d'écouter "Fez / Being born" , "White as snow", ou la délicatesse de "Cedars of Lebanon", mais aussi sur les titres plus épiques tels "No line on the horizon", "Magnificent" ou surtout "Unknown caller". On entend dans "Moment of surrender"(un moment d'abandon) à quel point Bono se lâche, s'abandonne, donne tout, tout comme dans le pont de "I'll go crazy" (baby baby...). "Get on your boots" rock diablement et "Stand up" a des accents funk et quelques accents sixties.



Tout ça sent bon la fraîcheur et la jeunesse. Tant pis si tu ne comprends pas ça. Il y aura toujours des branleurs pour critiquer ceux qui font.



Un miracle se produit avec Eno et Lanois encore aux manettes. C'est vraiment une production de haut niveau, et U2 n'est jamais aussi bon que lorsqu'il se laisse guider et triturer. Tu sens que tout le monde s'est appliqué à donner ce qu'il a de meilleur. Et l'émotion est bien présente à tous niveaux, dans les interprétations, les arrangements, et jusque dans la voix de Bono.


L'âme de U2 est encore là : tu la trouveras sous chaque titre, et particulièrement dans"Fez / Being born". C'est LE titre qui rappelle le plus l'album "The unforgettable fire". Et aussi dans "White as snow", selon moi le titre le plus émouvant de l'album.


Ainsi, No line on the Horizon est un album solide, cohérent, intense, passionné, diversifié. La production est riche et les chansons sont toujours bien foutues.
Alors que veut-on de plus ?


C'est aussi finalement l'album de U2 qui me toucha le plus.


Le cœur y est , je le sais...
mon cœur d'enfant de 13 ans s'était réveillé.....24 ans après...


Merci

Laughing-Stock
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le 6 févr. 2017

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