Spiritueux elliptique

C'est assez marrant de critiquer cet album aujourd'hui sur l'internet d'amazon, google, apple etc..., ce disque, à l'époque, je l'avais acheté en inscription au Music Club, une filiale de France Loisir qui faisait de la pub sur les programmes TV et une fois inscrit, tu recevais un catalogue tous les trois mois avec la sélection que l'entreprise te proposait. Même si dans ma campagne, ce procédé était pratique, maintenant, je vois ça comme la préhistoire.

Ça tombe bien de remonter aussi loin pour parler de Mick Jagger, de par son coté dinosaure en voie de disparition d'une part, mais il correspond plus à l'hominidé du début du film de 2001 (guetteur de lune dans le livre), celui qui découvre l'outil, qui fout une rouste à la tribu d'en face et projette son os dans les airs pour formuler la plus belle ellipse temporelle du cinéma.

Et ouais, le bougre a toujours su se projeter en avant et a participé, en bien ou en mal, à toutes les innovations de modes, techniques ou commerciales depuis les sixties et si les cailloux défraichis inaugurent les nouvelles salles à travers le monde, force est de reconnaitre que mimi y est pour quelque chose.

Pour en revenir à mon expérience avec ce disque, je n'étais pas encore un balèze en Rolling Stones: Flashpoint, Rewind, Hot Rocks!!!, Black & Blue, Emotional Rescue, It's Only Rn'R, y avait encore du boulot et Wandering Spirit est venu enrichir ma, encore, maigre discothèque avec une fraîcheur sympathique et un son bien ancré dans son époque, voire, supérieur à l'ensemble de la production environnante. Fort de la réception toute nouvelle de M6, j'étais emballé par le single Sweet Thing, de loin le meilleur titre du disque, mais la variété de morceaux qui composent l'ensemble promet une belle promenade dans le registre d'un mec qui porte bien plus que le commun des rockeurs ou autres starlettes en tous genre. Deux rocks efficaces, des titres soul/funk perso ou repris de belle manière, un peu de pop gouailleuse à souhait et le minimum obligatoire de folk music pour un Rolling Stones, sans oublier le titre d'anthologie,tendance blues rock, qui nommera l'album . Si, seul le titre Don't Tear Me Up est en dessous, je regrette aussi la présence de Lenny Kravitz et son chant maniéré à la mode de l'époque qui ancre l’œuvre dans son année plutôt que dans une carrière.
En fait, je consacre ce moment à ce disque car j'adore me balader dans le temps et celui ci a fait son temps. Par la suite j'ai eu Sticky Finger puis j'ai fait ma période rock psychédelic, mon expertise d'Hendrix, ma période rythm n' blues, ma période blues, ma période jazz, au bout de tout ce temps, je me rends compte que je l'ai régulièrement sorti de la cave avec plaisir. Aujourd'hui, il est dématérialisé dans mon DD mais à chaque fois que j'ouvre la boite du CD, ça me fait un choc, l'épaisseur du disque, le mode d'impression, je me demande même s'il va marcher et je me rappelle au bon souvenir de Philippe Manoeuvre (et ouais, j'ai déjà lu R&F) qui l'avait saigné en le qualifiant de disque d'un pauvre mec qui s'appelle Michael Philip Jagger et qu'il n'a rien à voir avec le chanteur des Rolling Stones. Si mon avis vaut que ce qu'il vaut (pas grand chose, sauf pour moi), trente ans après, il est bien possible que je l'ai plus écouté qu'un Beggars Banquet auquel je donnerai une meilleure note, surtout, ça me fait tout drôle de l'écouter alors que n'écoute plus les Stones depuis un moment. Sûrement parce qu'il vaut plus qu'un disque solo, qu'il vaut plus que l'ensemble des disques des Rolling Stones sortis depuis, mais surtout qu'il fait partie de ma jeunesse comme Beggars Banquet fit partie de la jeunesse du crouton à lunettes noires et que, comme dit Brassens, c'est toujours de la fille de la première fois qu'on se souviendra.