Wish You Were Here
8.5
Wish You Were Here

Album de Pink Floyd (1975)

La caractéristique première de l'art, je dirais, c'est de pouvoir s'y retrouver.
C'est d'autant plus probant avec la musique : ici la voix perçue, les mélodies jouées, les harmonies et l'ambiance globale des morceaux nous permettent de visualiser une scène précise, de changer notre humeur, de rêver, de s'évader et bien d'autres merveilleuses choses encore.
Le truc avec Pink Floyd, c'est qu'ils sont la définition même de la musique.
Ils divisent autant qu'ils sont adulés et aimés, ils composent de véritables chef-d’œuvres de pratiquement une demi-heure tout en écrivant des chansons formatés pour la radio, ils sont exubérant et minimalistes à la fois, fous et conscients, arrogants et humbles, marqués par des périodes précises de leur immense carrière qui font l'objet d'immenses polémiques et de débats, autant parmi les fans avertis de la formation que chez les simples mélomans amateur d'expérience musicale.


Moi, j'aime Pink Floyd.
Je ne suis pas fan de la période post-The Wall (j'ai d'ailleurs beaucoup de mal avec cet album), j'ai toujours eu un peu de mal à rentrer dans l'ère Syd Barret, et se sont parfois des albums entier qui m'ont laissés de côté.
Et pour certaines personnes, c'est même toute leur discographie qui n'a jamais pu être accessible. Trop abstraite et expérimentale aux premières écoutes tout en étant incroyablement riche mais ponctuée d'intervalles étrange et minimalistes, la musique de Pink Floyd à tout pour en dérouter plus d'un, et moi le premier.
Faut dire que quand je suis passer de Metallica, Led Zeppelin et Nirvana à une musique de génies psychédéliques shootés à des drogues dont tu ne veux même pas connaître les effets, j'ai pas vraiment eu le temps de capter tout ce qui m'arrivait. Mais faut un temps à tout.


Bon, maintenant, et si on abordait le sujet de cette critique ?
Wish You Were Here, au delà d'être unanimement considéré comme le sommet artistique et créatif du quatuor, c'est également et selon moi l'album le plus accessible de la carrière du groupe.
Alors oui, on serait tenté de répondre que non, c'est plutôt The Dark Side Of The Moon qui peut prétendre à ce titre, mais moi j'ai envie de répondre foutaise.
Foutaise.
Wish You Were Here est pour moi l'un des rares albums de Pink Floyd qui puisse être écouter par n'importe quel amateur de n'importe quel style de musique tant la musique semble vivre d'elle-même et le son émaner d'une autre dimension.
L'ouverture tout simplement magistrale de Shine On Your Crazy Diamond, semblable à un lever de soleil immense et rayonnant, suivit de près par le dantesque et immersif Welcome to the machine, où la voix de David Gilmour se fait gargantuesque et les claviers de Wright saisissants d'intensités.
Puis un autre titre fait alors son apparition : plus tranquille, presque dansant et transpirant la nonchalance par tout les bords : Have A Cigar. Mais derrière tout ça se cache une critique acerbe de l'industrie musicale ; cette même industrie qui a buté Syd quelques années plus tôt.
Oh, et tant qu'à parler de lui, des bruits parasites émanant d'une vieille radio se font alors entendre.
Puis se sont des notes acoustiques secs, métalliques et presque rouillées qui émergent de cette vieille radio, qu'on penserait poser en haut d'une colline, battue au gré du vent;
Wish You Were Here est une piste d'une tristesse jamais égalée. Oubliez vos Nothing Else Matters, Creep et autres The Show Must Go On. Ici Chaque accord, chaque note, chaque mot prononcé par Gilmour sur cette chanson vous prend aux tripe, vous retourne, vous emporte pour finalement vous faire pleurer. Et vous n'y pouvez rien. Cette tristesse, cette amertume ressentit par le groupe suite à la "mort" de Syd Barret se communique comme un simple toucher.



What have we found ? The same old things, wish you were here.



Sur cette touche d'une intensité sans nom, qui pourtant ne tombe jamais dans la pathos ou le larmoyant bas de plafond, l'album semble presque se terminer.
Mais s'il s'est ouvert sur une aube, il se doit de se conclure sur un crépuscule.
La seconde partie de Shine on your crazy diamond s'érige finalement en ultime morceau de cette immense oeuvre qu'est Wish You Were Here.
Un coucher de soleil qui n'est pas froid, désolant et terrifiant d'envergure comme pu l'être l'éclipse d'Echoes sur Meddle.
Ici, l'ultime piste annonce une nuit étoilée, tiède sans être humide, un paysage bordé et recouvert d'étoiles.


Sans être Einstein, on devine tous les thèmes de cet album : la solitude, les remords, le passé, les souvenirs perdus.
Nous n'avons pas connu Syd, mais on peut tous s'identifier à Pink Floyd.
Qui n'a jamais pleuré sur la mort d'une personne, ou même sur la direction lointaine et tragique qu'a pris une de nos plus proches connaissances ?
Qui ne s'est jamais rêvé à revivre des souvenirs appartenant à un temps révolu, à une époque que plus jamais il ne connaîtra ?
Qui ne s'est jamais remis en cause, questionné sur ses erreurs passées ?


En fin de compte, on a tous une part de nous-même dans ce CD ou ce vinyl. Sans pourtant connaître foncièrement Pink Floyd, leur musique et leurs titres nous parlent comme un langage universel. Quelque chose de limpide, clair, et aussi étrange que cela puisse paraître... Baigné d'espoir.

LounisPage-Morello
9

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Créée

le 22 nov. 2017

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