Est-il seulement possible de ne pas aimer cette BD, ou du moins, de la trouver mauvaise? Quel argument serait alors donné? Que les femmes ne doivent pas avoir d'héroïne, qu'on n'a pas à en parler, que le féminisme c'est nul et le machisme c'est la vie? Bref, vous l'aurez compris, le projet Culottées est trop bon pour ne pas plaire à tout le monde. Pénélope Bagieu raconte en BD la vie de femmes qui ont décidé de ne pas faire ce que la vie leurs imposait.
L'idée est géniale en cela que la majorité ne sont pas connues du grand public. Rajoutons qu'en prime on a de tout : des impératrices de Chine, des actrices, des mamies à la retraite, etc. Le but est juste de sensibiliser aux destins hors du commun et ignorés de femmes qui, si elles avaient été des hommes, seraient connues de tous.
Je dois avouer que je n'aime pas Pénélope Bagieu : les autres BD que j'ai lu d'elles sont médiocres et ouvertement sexistes. Mais depuis pas mal d'années que je n'ai pas lu ses travaux, elle semble s'être déconstruites et c'est donc avec beaucoup de plaisir que je vois ce travail.
C'est beau, c'est bien écrit, c'est captivant. Vraiment captivant ! On a un réel désir d'en savoir plus. Chaque récit se termine par une illustration très belle qui met en scène le personnage de l'histoire. On enchaine les beaux récits et les belles idées, les belles informations sur des figures méconnues qui nous captivent, nous émeuvent voir nous font pleurer dans certains cas tant leur vécu est bouleversant.
Seul léger défaut : certaines biographies politiques portent à montrer l'héroïne comme « gentille » et « valeureuse » alors que souvent c'est d'une extrême nuance. Dire « les femmes sont les gentilles » quand on parle d'intrigue mêlant meurtre d'innocents et extermination conséquente me semble parfois dure, même si c'est une autre époque. On a l'impression que le même acte est condamné s'il est commis par un homme et encensé si c'est par une femme. L'idée, selon moi, est que parmi toutes les belles personnes présentes dans cet ouvrage, les femmes politiques ont une place à part : leur domaine de prédilection les condamne, comme leur homologue hommes, à être des personnes cruelles et profondément malsaines.
L'angélisme à ce sujet est un léger défaut et j'espère que le fond de ma pensée transparaît facilement (en somme, ce n'est pas parce qu'une femme réussit à vaincre l'horrible sexisme du monde que sa cruauté devient un acte bon).
Mais heureusement, ça reste du domaine du détail et on a un tome génial, avec plein de biographies très chouettes. Bagieu, en effet, parvient à rendre ça dynamique et ne tombe pas dans l'énonciation sans vie. Résultat : féministe ou pas, intéressé par l'histoire ou juste par les vies extraordinaires, cette BD est faite pour vous !