Les deux vies de Baudouin
7.6
Les deux vies de Baudouin

BD franco-belge de Fabien Toulmé (2017)

Il est vrai que quand on porte le même nom qu’un ancien roi des Belges, on pourrait croire que cela prédestine à de grandes choses. En fait, c’est tout le contraire pour notre héros qui est plutôt introverti et qui aime être rassuré en toutes circonstances. Depuis 10 ans, il est juriste dans une des tours de la Défense. Il a organisé son avenir professionnel pour faire plaisir à son père et s’assurer une vie, financièrement confortable en attendant la retraite. Quand soudain, il apprend par un spécialiste qu’il n’a plus que quelques mois à vivre. Aidé par son frère, il rédige une liste de choses qu’il aimerait réaliser avant la fin inexorable qui l’attend. Il décide alors de tout plaquer pour suivre celui-ci, médecin humanitaire, qui doit partir en mission au Bénin. C’est le début d’une nouvelle aventure pour Baudouin qui va apprendre à voir la vie différemment.


Après la lecture de « ce n’est pas toi que j’attendais », le premier roman graphique de Fabien Toulmé, j’étais impatient de lire une autre histoire de cet auteur. C’est pourquoi, j’ai rapidement acheté l’album à sa sortie, chez mon libraire préféré. Mais comme bien souvent, la vie fait qu’il peut se passer un peu de temps entre le moment de l’achat et celui de la lecture. J’avais eu tout de même un a priori très positif car je m’étais tout de suite dit qu’une BD qui fait référence à l’une de mes chansons préférées des Stones, dès la première page, valait forcément la peine d’être lue. Je l’avoue, je n’ai pas été déçu.


Ayant moi-même effectué une reconversion professionnelle pour un job plus en adéquation avec mes valeurs et me permettant de consacrer plus de temps à ma famille et à mes projets personnels, j’ai totalement adhéré à la première partie de l’album où Luc, le frère de Baudouin, essaye de le convaincre de quitter le confort de son quotidien « éteint » pour se réaliser et profiter de la vie. Par contre, le fait que l’histoire glisse vers le cliché de l’homme à qui « il reste peu de temps à vivre et qui décide d’en profiter à fond », m’a un peu échaudé au départ. Je me suis demandé si le récit n’allait pas basculer en une histoire poussive avec de nombreux poncifs. Ce n’est finalement pas le cas puisqu’ il reste touchant et évite les jugements à l’emporte-pièce. C’est plutôt une réflexion bienveillante sur le thème de « ce que l’on est » et de « ce que l’on aurait voulu devenir ». Doit-on renoncer à ses rêves au profit d’une vie confortable ou alors au contraire tout faire pour les réaliser ?


Au fil des 272 pages de cet album, l’auteur capte notre attention et nous intéresse à ses personnages, par leur épaisseur qui les rendre attachants. Il nous présente ces deux frangins, diamétralement opposés : Luc est un baroudeur alors que Baudouin est plus « frileux », Luc est un « tombeur » alors que Baudouin est plus timide… Cet antagonisme entre les frères n’est pas forcément original mais fonctionne parfaitement. De plus, pour donner une histoire à l’histoire, Il utilise notamment des pages de souvenirs qu’il identifie clairement en utilisant des tonalités pastels et une page d’introduction constituée d’un polaroid dessiné. Ces Flash-back permettent d’avoir une vision globale des personnages que l’on ne retrouve pas souvent dans les bandes dessinées et qui va au-delà de l’aspect instantané et superficiel.


Le dessin sobre des expressions de visages et les décors parfois sommaires servent à se concentrer sur ce qui est important. Le coup de crayon efficace du dessinateur s’allie cette fois-ci aux couleurs très travaillées de Valérie Sienno qui nous transporte de la grisaille de Paris à la chaleur de Cotonou. Celle-ci a également su rendre avec brio l’aspect vieillot et un peu passé des polaroids qui ont vécu et qui servent de page de transition entre le récit et les flash-back.


L’auteur joue parfaitement l’effet de surprise en nous offrant même une fin à laquelle je ne m’attendais pas forcément. Dans cet album, on retrouve aussi « sa marque de fabrique », dans le découpage des scènes : un mixte entre les moments d’émotion et ceux plus légers, humoristiques. Et comme le dit un proverbe Béninois repris de manière un peu absurde par Luc, « Quand une Antilope sort de la forêt, elle ne demande pas à boire chez la Gazelle ». C’est aussi cela l’humour décalé de Fabien Toulmé.


Version illustrée : http://www.artefact-blog-bd.com/recit-complet/les-2-vies-de-baudouin/


Interview de Fabien Toulmé :
http://www.artefact-blog-bd.com/auteurs-bd/fabien-toulme/

Playmo44
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le 16 févr. 2018

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