Un couple, un crime, un scénario bien huilé : l'univers de Belvaux n'a pas changé depuis sa trilogie grenobloise. Pourquoi les 38 témoins n'ont-ils rien dit de ce qu'ils ont entendu la nuit du meurtre ? La fondation de l'histoire est, il faut le reconnaître, quasiment surnaturelle. J'ai vu plus d'un avis s'arrêter à son insuffisance, pourtant tout est lié : le pragmatisme policier, le cynisme juridique, la curiosité journalistique et enfin l'émotion que produit un meurtre dans ce quartier du Havre, c'est une dense machinerie narrative qui se met en place alors que l'on passe de l'enquête criminelle à une enquête psychologique sur ce trauma collectif un peu inhabituel qu'on dévoile peu à peu. J'aurais plutôt comme grief à son encontre une griseur poussée trop loin ; une forme d'apathie qui enveloppe la morale d'un linceul péremptoire et prématuré. Mais il n'empêche pas que plus rien n'est innocent quand on transforme les sentiments en paperasse.
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