Un instant de poésie autoroutière
A l'origine, il y a ce bout de France abandonné, dans le Nord, où les travaux de l'autoroute ont été interrompus par des écologistes. A l'origine, il y a les habitants de Caudry (ville qui existe, hein, c'est pas loin de chez ma grand-mère). A l'origine, il y a François Cluzet qui campe à merveille un arnaqueur de petite envergure, et Emmanuelle Devos, une maire pleine de bonne volonté aux épaules pas assez larges.
François Cluzet / Dominique Miller décide de passer à la vitesse supérieure dans ses arnaques en reprenant les travaux de l'Autoroute A61 Bis. Les retombées sont rapides, l'opération rondement menée mais la part des doutes augment à mesure que l'affaire prend de l'ampleur. PArce qu'un chantier c'est des hommes, Dominique Miller met des visages sur les noms qu'il arnaque et sa position devient ambigüe: arnaqueur ou bienfaiteur? Homme providentiel ou nouvelle désillusion pour une région qui n'a pas été épargnée par les crises? Je m'arrête ici pour ne pas dévoiler l'intrigue et passer à la critique.
Je bosse dans le BTP et franchement, certains passage m'ont énervé par leur naïveté, ou leurs incohérences. Genre l'autoroute éclairée la nuit, la pression des délais imaginaire, les travaux qui démarrent comme ça, les absences de vérification. Ou le ballet des engins de terrassement pour fair ejoli, avec François Cluzet qui gueule "Allez allez allez".
Mais le film m'a ému parce qu'il montre bien les rapports humains qui sont ceux qui unissent une espèce rare dans les fictions, les gens du BTP. Les acteurs et les figurants sont incroyablement bien castés et à leur place, ça fait plaisir à voir. Et puis le film est très, très esthétique pour quiconque saura y être sensible (personnellement quand j'étais petit je jouais avec des engins de terrassement sur un tas de sable chez ma mamie). Le ballet des pelleteuses, la pluie, les gars en gilets fluos, ça transpire l'odeur de béton frais. Ajoutez à ça des scènes purement esthétiques (gyrophares dans la nuit, ballons éclairants dans le lointain) et on frôle l'orgasme visuel. Moi ça m'a rappelé mes travaux de nuit, c'est fou.
Vous aurez compris que j'ai trouvé ce film beau, notamment à cause des souvenirs qu'il me rappelle. Sur le déroulement de l'histoire, A l'Origine m'a tenu en haleine du début à la fin: l'arnaque, sa genèse, sa croissance, les moments où tout vacille, les doutes, les espoirs... jusque la fin. Bref, un bon film français que j'ai aimé*
Voilà, c'était mon coming-out de mec du BTP et ma critique d'A l'Origine.