'For you I was a flame...'

J'avais pas mal de craintes avant d'aller voir 'Amy'. Principalement parce que j'aimais, que dis-je, j'étais fan de Amy Winehouse. Et avouons le c'est toujours difficile de voir ou d'écouter une oeuvre posthume d'un artiste qu'on aimait, parce qu'on manque d'objectivité et aussi parce qu'on a peur de voir ses failles.

Ce dont je craignais surtout c'est que le film ne se concentre que sur une partie de la vie d'Amy Winehouse, celle dont tout le monde parle et qui occulte tout le reste. Bien sûr, il est difficile de ne pas parler d'Amy sans parler de ses abus et scandales. Mais c'était avant tout une voix, celle qui rappelait les plus grandes chanteuses de jazz, Billie Holiday et Ella Fitzgerald en tête. Pour une fan de jazz, Amy c'était le summum, le kiff total, le voyage dans le temps et la classe éternelle (oui, oui). Puis, Amy était une vraie grande fan de jazz et de bonne musique, le début du documentaire le montre très bien, elle était vraiment heureuse quand elle jouait dans des clubs de jazz devant 50 personnes. En plus de tout ça, Amy c'était une plume. Je suis très contente de voir que le film accorde une place importante à ses lyrics, car Amy se racontait vraiment dans ses chansons.

Le film est donc fidèle à Amy, il montre ce qu'elle était avant de devenir la superstar, ses aspirations, ses inspirations... Pas seulement la chute, ouf me voilà rassurée !
D'ailleurs, pour moi, le meilleur moment du documentaire se trouve à peu près au milieu; Amy est sobre depuis un petit moment, son Blake est en prison et elle se trouve nommée plusieurs fois aux Grammy's pour son magnifique album 'Back to black'. Tony Bennett est là, près d'elle pour annoncer sa victoire. Les yeux écarquillés, Amy se trouve près de celui qu'elle admire depuis toute petite, 'Regarde papa' dit-elle. Quelle merveilleuse image, trop souvent oubliée, celle d'une vraie fan de jazz, qui n'en avait strictement rien à foutre de la gloire. Quelques minutes plus tard, son nom est placé tout en haut, Amy a gagné. Elle fonce dans les bras de son équipe, elle a l'air tellement heureuse, tellement sonnée. C'est un moment vraiment touchant, presque troublant. Et pourtant, plus tard dans la soirée elle dira à une de ses amies d'enfance : 'sans la dope, tout ça c'est nul'. Ce moment est à la fois magique et tellement triste. Et il résume à lui seul la vie de cette fille issue d'une famille modeste londonienne: celle d'une nana dotée d'un énorme talent très jeune mais qui a toujours été mal dans sa peau.

'I don't ever want to drink again I just, ohhh, just need a friend'

Et plus le film avance plus on la voit évoluer. On parle de moins en moins musique, elle perd son sourire en même temps que ses kilos. La célébrité est là, la drogue et l'alcool aussi. Il est appréciable de voir que Kapadia garde une certaine distance avec son sujet, bien sûr il nomme des possibles coupables dans cette descente aux enfers, mais libre à chacun de prendre position. Et de toute façon il est difficile de pointer du doigt quelqu'un dans cette affaire. On pense bien sûr à son père qu'elle idolâtrait mais qui était si peu présent durant son enfance et un peu trop pendant sa carrière, on pense au fameux Blake aussi, qui l'a initié aux drogues dures et à la vie de junkie. Puis il y a le succès et tout ce que ça entraîne, les paparazzis, les critiques, les moqueries, les parasites... Mais le documentaire explique bien que le malaise d'Amy était présent depuis très longtemps, depuis l'adolescence même quand à 13 ans elle est mise sous antidépresseurs et que quelques temps plus tard elle dit à sa mère 'Maman j'ai trouvé un régime génial, je peux manger ce que je veux et après je me fais vomir' Sa mère ne réagira pas, résultat ? Toute sa vie Amy sera boulimique.

Toute cette histoire est vraiment triste et on est d'autant plus attristé quand on se rend compte qu'on est au ciné, un paquet de pop corn à la main, en train de non pas regarder une actrice jouer un rôle mais bel et bien Amy, c'est sa vie, c'est sa fin.

Même si le documentaire est bien réalisé (l'idée des lyrics est top, de même que les vues sur Londres pendant les messages sur les répondeurs) j'aurais préféré que le réalisateur ne s'attarde pas sur ses photos d'elle défigurée, saoule ou camée. Tout le monde a vu ses images et c'est comme si on continuait de s'abreuver de ça. Je pense que ça nous aurait suffit de savoir ses choix sans en voir forcément les conséquences. De même qu'il était vraiment dispensable de nous montrer son corps inerte sur une civière... Mais il en est ainsi, c'est ce qu'Amy était devenue et c'est malheureusement ce que trop de gens retiennent d'elle.

Personnellement, je ne veux retenir d'elle que sa musique, sa voix et la force des mots qu'elle utilisait comme pour se soigner. Il y a un live qui date un peu et qui m'a toujours fasciné, c'est celui-ci :
https://www.youtube.com/watch?v=_gmZTAt1lls
La voilà la vraie Amy.