Véritable tour de Babel ce film déconcerte part son côté totalement inclassable : road movie, western, tragi-comédie, fable surréaliste, à quel genre le rattacher ? A quelle nationalité ? Quel type de message veut il nous transmettre ? Cet opéra bouffe, à l’échelle des immenses déserts californiens,mais au rythme interne essentiellement slave , a comme fil conducteur un poisson de conte de fées au milieu d’un mélange de folklore reggae, d’un orchestre mexicain, d’une mariée polonaise et d’une partie de roulette russe... Contournant l’impasse new age et l'onirisme facile dans lequel se fourvoiera Terence Malick avec The Tree of Life, Kusturica tente de faire échapper ses personnages à la pesanteur terrestre par des motivations simples : exprimer pleinement son amour de la liberté ; le désir d’absolu qui les happe tous, y compris les plus négatifs ; s’arracher, de gré ou de force, à la promiscuité du quotidien. Cocasse parabole aux dimensions planétaire, ce fascinant pandémonium regorge de fantasmes, plus proches au demeurant de Chagall que de Fellini, mais n’oubliant pas de faire à clin d’œil au Paris Texas de Wim Wenders ou aux grands westerns en couleurs de John Ford et d’Anthony Mann.Une sorte de spectacle total.