Un portrait syncopé, spectral et dédoublé

Quand Amalric invoque Barbara, la chanteuse revient dans un portrait syncopé, spectral et dédoublé. Il y a la Barbara que l’on découvre au travers des images d’archives et notamment le documentaire de Gérard Vergez de 1972; puis il y a Jeanne Balibar, un nez postiche, splendide, contemporaine, fragile et lovée d’extravagants boas de plumes noires. Les deux artistes dialoguent dans une valse d’outre-tombe. On serpente, c’est un va-et-vient entre l’actrice et son modèle. Les époques se confondent, l’espace temps s’amenuise. Du grain de la voix au grain de l’image, l’illusion est troublante et le traitement en miroir donnera de la pudeur au biopic, une hauteur, de la retenue pour saisir la bohème de Barbara.


Barbra subjugue, Jeanne Balibar magnétise. Néanmoins, le film n’aura qu’une faible ampleur biographique. Aux antipodes de biopics comme les récents Dalida ou Django, l’audace scénaristique pourrait le rapprocher d’un Joann Sfar et de son Gainsbourg, Vie Héroïque. Il y a en filigrane la critique du biopic, une variation sur un genre. Le cinéaste est résolument moderne et les retrouvailles avec celle qui partageait sa vie donne au film une portée symbolique émouvante. Dès les premiers instants, la musique de Barbara est présente, magnifiée lors d’instants volés au piano. Délibérément lacunaire, à la fois brut et sophistiqué, c’est un film conscient du réel qui déroutera les Barbaraphiles et pourtant, c’est envoutant.


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guardianalfred
8
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le 5 sept. 2017

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