Froid et générique

Il faut attendre une heure avant de voir Batman, le film s'intéresse d'abord à Bruce Wayne. C'est quand même pas rien, ce choix, puisqu'on sait globalement que le public dans sa grande majorité ne s'intéresse pas vraiment au personnage et veut voir un super-héros cool avec des gadgets se battre contre de gros vilains, comme on devine que derrière les producteurs veulent offrir ce que ce même public vient chercher. Sur ce point Christopher Nolan est à remercier.

Le problème (venant de lui ? des producteurs ?), c'est que malgré une approche volontairement plus terre-à-terre, Batman Begins reste un film de super-héros très en retard sur les comics, au moins ceux prenant une direction plus réaliste (Year One, notamment). On prend le temps de justifier les errements des déguisements et leurs améliorations, de donner une origine solide aux équipements, mais sur le plan formel ça reste globalement kitsch et idiot. Ne pas vouloir d'une bat-mobile avec des ailerons de chauve-souris, parfait ! Mais cet espèce d'engin ridicule digne des jouets GI Joe qui fait des bonds pour soi-disant permettre des construire des ponts, est-ce réellement mieux ? Un simple hummer n'aura-t-il pas fait l'affaire ? Tout comme ces histoires de grosse turbine fluo transformant l'eau en vapeur. On côtoie deux univers qui s'imbriquent mal, celui d'une ambiance qui se veut plus adulte avec un côté pour les enfants fantaisiste à souhait, on mélange le réalisme de Year One (sans aller aussi loin) avec le blockbuster façon Scott Snyder.

Puis c'est un film, aussi. Alors soit on fait un film destiné aux enfants et on assume (façon Schumacher), soit on adapte vraiment le comics en virant tout ce qui ne passe pas à l'écran. Franchement, est-ce que Batman, si son souhait est de faire peur, se mettrait un logo de chauve-souris sur le torse et une ceinture cuivrée autour de la taille ?

Nolan joue avec notre perception, ne montrant jamais Batman au complet, le plaçant souvent dans la pénombre, ou alors, lorsqu'il se déploie, en figure iconique de la peur marquant au fer rouge (idéalement, parce qu'il a l'air plus cool que terrifiant). Il y a une volonté de faire film d'horreur, loin d'être assez poussée, mais tout à fait louable et dans le ton de certains comics. Mais de l'autre, le côté cosplay de Batman et des méchants (la moustache de Liam Neeson...), les gros gadgets idiots, et cette vague impression de flotter dans un environnement générique grand public qui ne va jamais jusqu'au bout de ses ambitions, font de ce film une espèce de soupe fadasse qui ne convainc pas sur le fond, et n'a pour lui que sa forme ; réalisation propre, froide et sèche (Nolan, quoi).

Puis Tom Wilkinson pour jouer un parrain de la mafia italienne... très crédible.

Une version encore édulcorée, même si elle essaye de faire croire le contraire. Reste un film avec quelques efforts louables, contrairement à ses suites.