La rage de vivre coincé entre deux issues, c'est ce qui qualifierait bien le film, urbain, documenté, ancré dans une réalité qui nous échappe et mise en lumière dans la trajectoire de Many, arrivé en France dans la clandestinité par un passeur pour travailler et subvenir aux besoins de sa famille restée en Inde.


Alors qu'il s'acclimate de son cadre de vie dans un foyer d'accueil, à l'école et dans sa vie avec sa petite amie, l'appât du gain et du risque s'accentue jusqu'au point de non retour.


Réaliste sans voyeurisme et bien élaboré dans le récit pour éprouver les situations tendues tombées sur le statut du jeune Many, Bébé Tigre sait brosser une chronique adolescente intelligente qui fluctue vers le drame social dès que la route de la liberté rétrécit pour l'acculer au mur.
Il n'est pas qu'un simple ado, il possède le statut de mineur isolé étranger qui lui accorde droit et protection sur le sol jusqu'à ses 18 ans parce qu'il est arrivé sans ses représentants légaux mais il n'a pas pour autant la nationalité française, un enjeu conséquent au cœur du film.


La thématique liée aux migrants s'éclaire et s'approfondit par une juridiction quelque peu méconnue en alliant un pôle de personnages consacré à une vue globale de la problématique (le juge des enfants à l'aide sociale, l'éducateur spécialisé, la famille d'accueil, le passeur et les clandestins). Dans la relation Many/Kamal semblable à celle d'un père à son fils, c'est l'ambiguïté qui prend le dessus parce que le premier a été sauvé par le second visible dès la première séquence en le jetant droit dans les filets de l'assistance sociale bien qu'il demeure un personnage répréhensible par la continuité de ses activités. À Many de faire le bon choix dans son dilemme moral.


L'intégration est aussi une donnée importante du film placée sur le territoire de la Seine Saint Denis riche en diversité, voir la très belle séquence des élèves habillés dans leurs vêtements traditionnels suivie par la déclaration d'amour en chanson Pendjab de Many. La réalisation met en valeur la culture des Sikhs. Les coutumes, son temple et la musique est une belle manière de souligner son quotidien qui s'équilibre avec l'environnement où il s'est fait une place depuis deux ans.


Film d'utilité publique, et les mots ne sont pas volés, Bébé Tigre gagne beaucoup en authenticité avec une pluralité d'acteurs débutants qui est bien dirigée. De l'acteur principal au visage et caractère fragiles qui doit s'affirmer à la petite amie au franc parler sec mais sensible, on ne décroche pas du regard, les oreilles elles-mêmes marquées par une bande son électro pop ou du rap du Pendjab (The Humble Poet - Baagi Music). Une surprise à découvrir.

John_Irons_Stee
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le 29 mai 2020

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