Critique garantie sans spoiler


La sensualité est l’une de ces essences difficiles à capturer sur pellicule, quand quelque chose réfère à ce point à la chair, à la sensation du toucher et à l’exaltation de l’être entier, il est compréhensible que le recréer sur grand écran soit un véritable défi. Call me by your name se lance le lourd pari de transcender la simple romance pour proposer une œuvre sensuelle unique. Mais y parvient-il ?


Elio, 17 ans, est troublé par l’arrivée d’un jeune universitaire chez lui, invité par son père. Leur relation devient rapidement particulière au cours de cet été 1982 alors que l’adolescent voit sa sexualité s’éveiller. Au détour de son histoire des plus élémentaire, Call me by your name frappe surtout par la finesse de son écriture, constamment juste, et par les relations créées entre les personnages. Lentement, on voit qu'ils évoluent, se parlent, se rapprochent l'un de l'autre. On apprend à aimer la famille érudite d’Elio, mais aussi le personnage d’Oliver, qui doucement va remettre en cause les croyances de l’adolescent sur sa propre sexualité.
Call me by your name prend son temps, il ne précipite pas ses personnages et nous permet de les apprécier. L’Américain pouvant sembler un peu lourdaud devient sympathique et l’adolescent si lettré n’est pas pour autant tête à claques. On se passionne pour leur relation compliquée, qui oscille entre haine et tension amoureuse. Leurs conversations passionnent et le film se montre de plus en plus généreux jusqu’à offrir à un troisième acte lancinant, mais ultra-satisfaisant et un épilogue particulièrement fort qui conclut de la manière la plus poignante cette escapade italienne.


Au fil des matchs de volley ball, des scènes près de la piscine et des ballades à vélos au cœur de la campagne du nord de l’Italie, Luca Guadagnino parvient à créer une nostalgie de ces moments passés en Italie que l’on n’a pas vécu. Sous le soleil transalpin brûlant et de ses couleurs magnifiques, les deux hommes se rapprochent, d’abord par des regards, puis par des effleurements, des contacts. La caméra de Guardagnino ne se veut jamais indiscrète et pourtant chaque moment entre Elio et Oliver transpire la sensualité et présage des ébats futurs.
La réalisation de Guadagnino se veut la plus naturaliste possible, face à la beauté des décors du nord de l’Italie, le réalisateur n’a pas à trop appuyer pour créer une atmosphère sublime propice à cette belle romance. Les effets de style sont rares, et ne sont là que pour appuyer les tourments d’Elio. Certains pourraient reprocher une certaine pudeur face au sexe homosexuel en comparaison des scènes hétérosexuelles, il est vrai. Cela dit ce n’est jamais la vraie question, la sensualité est ailleurs.


L’art a une place importante dans les rapports entre les personnages, Oliver tombe sous le charme du savoir du jeune Elio, mais surtout, la musique joue un rôle crucial. Que ce soit les classiques joués par l’adolescent mais aussi les enivrantes partitions originales chantées par Sufjan Stevens : la musique est un véritable vecteur des émotions qui traversent Elio. La bande-originale de Call me by your name est du genre de celle qui vous hante des jours durant et dont quelques notes vous rappellent de lourds moments d’émotions.
S’ils ont peut-être été trop pudiques pour offrir des scènes d’amour plus généreuses, le tandem formé par Armie Hammer et Timothée Chalamet respire une alchimie qui porte la crédibilité de la relation que leurs personnages entretiennent. Dans le reste du casting, Michael Stuhlbarg sort forcément du lot grâce à une justesse impressionnante au cours d’une des dernières scènes du film.


De ses prémices intrigantes, et porté par la relation unique entre ses deux personnages, Call me by your name est une véritable évasion de deux heures, avec comme décor la magnifique Italie et comme sujet une histoire d’amour estivale qui va dépasser ses frontières dans une deuxième moitié débordant de sensualité mais aussi de puissance dans un épilogue qui fait définitivement rentrer Call me by your name dans le club fermé des romances marquantes du cinéma.

BastienGiot
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le 1 mars 2018

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