This is who I am, this is who you are, this is what I want.

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Difficile de critiquer un film tel que Call Me By Your Name. Difficile de mettre des mots sur un film qui est devenu bien plus que cela. L'œuvre de Guadagnino est d'une beauté et d'une minutie sans pareilles, et quand bien même les visions se multiplient, on ne peut que découvrir certaines caractéristiques nous frappant et nous éblouissant toujours plus. Call Me By Your Name est définitivement plein de surprises.


Tout commence en 1983, près de la somptueuse ville de Crema, en Lombardie. Oliver, d'une beauté américaine frisant le cliché, arrive chez les Perlman, famille polyglotte s'offrant le plaisir d'accueillir durant six semaines un étudiant en été. Elio, accompagné de son amie Marzia, regarde tout de haut, et admire pour la première fois cet homme, qui va chambouler cet été se devant pourtant d'être si banal.


Le film ne se veut pas politique, et installe son histoire d'amour homosexuelle en 1983, aux prémices de la découverte du SIDA, qui ne trouvera pas sa place ici, étant encore trop éloignés des scandales américains sur la question. Il ne se veut pas moralisateur, ne traite pas de la question du coming-out – ou très peu, avec le point de vue d'Oliver et de sa famille homophobe citée dans quelques magnifiques passages – et de toutes ses complications. Non, ici, ce film se veut beau, simple, et ne veut montrer que les sentiments d'Elio face à un amour et homme l'ayant pris au dépourvu, pour le changer à jamais.


Call Me By Your Name parle surtout du passage à l'âge adulte, mais pas d'une quelconque manière. Au travers d'Oliver, Elio va se voir changer, ressentir des émotions pourtant trop fortes pour un jeune homme de 17 ans, mais la manière dont il va les assumer, de façon si mature est ce qui peut sans doute impressionner le plus dans l'écriture de ce film. Porté par un Timothée Chalamet impressionnant, Elio ne laisse pas de marbre, malgré son physique simple et son caractère bourgeois. Bien au contraire, on comprend comment Oliver s'est laissé tomber dans cette aventure, pourtant si dangereuse à ses yeux, avec cet adulte caché sous des airs adolescents.


Elio et Oliver vont s'aimer, sous la caméra de Guadagnino qui a fait attention à chacun des détails. Par les décors jusqu'à la musique, en passant par le choix de chacun des acteurs, tout est savamment réfléchi, pour nous emporter dans une ambiance estivale, et ô combien émouvante. Fidèle, – mais pas tant que ça – le réalisateur ici nous donne son adaptation du livre éponyme d'Aciman, « qui ne pouvait écrire le silence ». Guadagnino donne une voix à ce silence, se l'approprie au détour de ses acteurs, pour nous faire vivre l'aventure de ce livre selon son point de vue.


On critiquera peut-être le fait que Guadagnino n'a pas été assez fidèle à l'œuvre première. Autant l'interruption du film 40 pages avant la fin est compréhensible à la suite du choix d'une suite – qui n'est pas une si mauvaise idée que cela – autant la dernière nuit d'Oliver et Elio avec le fameux écrivain est, à mes yeux, un gros point manquant au film. Cette scène-là, si importante, si belle, aurait sublimé en de nombreux points les dernières minutes du film. Tant pis, peut-être que ce sera pour la suite.
On critiquera peut-être aussi cette timidité face aux scènes érotiques entre les deux amants. Celles-ci étaient très bien écrites sur le scénario, mais la décision de les supprimer est franchement dommage. Le tabou encore trop présent sur les scènes homosexuelles en vient même à gâcher un film pourtant si prometteur.


Le choix de caméra utilisé par Guadagnino est très intéressant. Par ce choix-là, par ces flous constants, nous entrons dans l’histoire, nous sommes Elio, nous partageons sa vision des événements, ses sentiments. Immersion de plus possible avec Sufjan Stevens, qui devient ici le narrateur voulu au départ par James Ivory. On retiendra cette dernière chanson, Visions of Gideon, et cette dernière image, ces dernières larmes, nous rappelant que nous n’avons pas eu affaire à une simple romance d’été, narrée de si nombreuses fois dans le septième art, mais que nous avons eu notre part dans les sentiments partagés par Elio, par Oliver.


James Ivory a fait un travail fantastique sur l’écriture du scénario. Plein de beauté, il était le seul à pouvoir retranscrire à la perfection l’œuvre d’André Aciman. La tâche était au départ compliquée : comment retranscrire à l’écran un ouvrage aussi puissant que celui-ci ? Mais Ivory l’a fait, et a été d’une belle poésie, faisant parfaite équipe avec Guadagnino et Stevens.


J’ai hâte de voir ce que peut donner ce second film. Combien il serait intéressant de voir un Elio complètement adulte, faire face à une nouvelle vie, assumée grâce à son père, mais aussi faire face à un Oliver toujours aussi menteur envers lui-même. Chalamet n’aura pu que se perfectionner au fil des années, ainsi comment l’idée de pouvoir le retrouver dans les traits d’Elio une deuxième fois puisse être si mauvaise ?

shamesvice
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le 18 mars 2018

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