Si d’un point de vue stylistique le film tend à offrir un cadre propice à la romance, l’intérêt se fait désirer. Ainsi on entre dans l’univers de Elio par sa maison de vacances, entouré des membres de sa famille cultivée, au beau milieu d’une Italie ensoleillée, où tout est fait pour vous rappeler la beauté. Des fruits du verger (offrant une scène de masturbation bien plus tard dans la narration) aux parents idéalisés, en passant par la découverte de status grecque, tout semble écrit pour favoriser la romance. Et en effet le bel éphèbe arrive sans que rien ne se précipite. C’est d’ailleurs aussi frustrant qu’adroit, cet art de ne pas y toucher, cette rancœur à peine voilée, ce jeu du chat et de la souris entre Elio et Oliver.
Il y a la candeur d’un Pauline à la Plage autant qu’un cadre maîtrisé de Visconti dans cette amourette esquissant le désir adolescent. Pourtant, je trouve le film long, peinant à trouver de l’intérêt quand pourtant tout y est. Voir Timotée Chalamet tourner autour du pot me désespère, et j’attends en vain que le film éveille ma curiosité. Désir lubrique ou pas (à chacun d’en juger) je trouve enfin l’attrait qu’il me manquait dans l’échange d’un baiser. De là, l’intrigue prend place dans l’attente du désir, de cette envie de commencer mais de ne pas tout gâcher. La relation qui s’installe alors entre les deux jeunes hommes s’accélère, même si la caméra s’autorise quelques facéties, elle en détourne par moment le regard, sans pour autant ôter l’intensité du désir. On erre alors dans ce plaisir fugace d’un amour qu’on sait éphémère.
Pourtant le film ne me cueille vraiment qu’à la fin, comme si toute la rencontre et l’attente suscitée dans le film ne devait servir qu’un discours, mais quel discours ! Celui d’un père qui saisit parfaitement les affres du désir adolescent et qui, sans juger, aide à soulager la peine d’un tel extase. On ne peut alors que souhaiter que l’adolescent en devenir passe par cette passion pour mieux aborder ce qu’il est. La fin donne alors tout son sens à cette amourette, en inscrivant son film dans la longueur, le temps qui passe, le réalisateur se défait des possibles obstacles qui viennent garnir un mélo. Ici, seuls les protagonistes sont maîtres de leur désir, car autant la maison que la famille bâtissent un havre de paix pour accueillir celui-ci. Le film se libère donc des poncifs du genre pour ne retenir que l’essentiel et la fugacité du désir autant que cette douleur qu’il faut préserver.

LuluCiné
7
Écrit par

Créée

le 4 mars 2018

Critique lue 354 fois

2 j'aime

LuluCiné

Écrit par

Critique lue 354 fois

2

D'autres avis sur Call Me by Your Name

Call Me by Your Name
Sergent_Pepper
8

Ce sédiment de l’été.

Par une savoureuse coïncidence d’agenda, Lady Bird et Call me by your name sortent le même jour en France en plus de partager un de leur comédien, qui de second rôle ténébreux dans le premier devient...

le 3 mars 2018

303 j'aime

18

Call Me by Your Name
Velvetman
8

Dolce Vita

Dans une Italie bucolique et pittoresque, Call me by your name de Luca Guadagnino nous raconte avec fièvre les premiers émois de deux démiurges. Le film est aussi solaire qu’un premier été, aussi...

le 1 mars 2018

145 j'aime

7

Call Me by Your Name
IvanDuPontavice
8

Au détour d'un été.

Il me suffit d'écouter en boucle ou de me repasser en tête le sublime morceau "Mystery of Love" de Sufjan Stevens pour retrouver cette sensation si particulière que peu de films arrivent à partager...

le 6 nov. 2017

123 j'aime

15

Du même critique

Memento
LuluCiné
5

Critique de Memento par LuluCiné

Les adorateurs suprêmes de Nolan ne citent que Memento comme référence. Pour tous les autres n'ayant pas un avis surdosé sur le réalisateur, le film vaut le coup d’œil pour son montage décousu...

le 26 nov. 2014

32 j'aime

4

Hérédité
LuluCiné
5

Critique de Hérédité par LuluCiné

Et voilà qu’on nous refait le coup du renouveau du film d’horreur, et cela à bon escient car c’est pour mieux s’éloigner du produit ultra fabriqué surfant sur la vague du marketing et du jump-scare...

le 18 juin 2018

26 j'aime

2

Knight of Cups
LuluCiné
3

Critique de Knight of Cups par LuluCiné

Mieux vaut savoir à qui on a affaire quand on va voir un film de Terrence Malick, son cinéma n'est pas à la portée de tous mais garde un mysticisme et une palette des sensations qu'on aborde toujours...

le 25 nov. 2015

21 j'aime

2