Le prototype parfait du "on aime, on aime pas"
Impossible pour moi de me faire un vrai avis sur le vif du dernier film de Cronenberg, preuve en est des critiques extrêmement divisées depuis sa sortie, c'est soit blanc soit noir. Pour ma part, je reconnais avoir vécu une expérience singulière. Pendant la projection, je n'arrivais pas à saisir, je n'étais pas à mon aise, loin de là, et pourtant le film m'attirait, je ne savais pas si j'étais en train de détester totalement le film ou si je l'aimais. Un peu après en être sorti, je me suis surpris à me dire que je l'aimais bien, et ce malgré des lacunes évidentes.
Je n'ai pas lu l'oeuvre originale mais je veux bien croire que le film lui est fidèle. Par contre, je n'adhère pas à l'adaptation dans le sens où je trouve la mise en scène vraiment moyenne, elle ne sert en rien le film ni les dialogues. Chaque élément gravite autour de Pattinson mais au moment de la collision, rien ne se passe et on a l'impression d'assister à un cours de masturbation intellectuelle, ce qui a le don d'énerver un grand nombre de gens. Le concept reste intéressant malgré tout puisqu'il intrigue et capte l'attention, mais à quelle fin? J'ai trouvé (mais c'est subjectif) certains personnages faiblards ou bien mal travaillés: l'exemple parfait étant le personnage de la femme, monocorde et impossible à cerner, qui cherche à amplifier sans vrai succès ce côté froid du personnage principal. A l'opposé, les personnages de Juliette Binoche et Kevin Durand, plus vivants et plus nuancées, entrent en contraste avec le héros.
A vrai dire, la vraie force du film réside surtout dans les 20 dernières minutes, cette dernière scène où Robert Pattison, qui a finalement fait un joli travail en évoluant lentement d'un automate froid et imperméable vers un disjoncté fracassé, fait face à un Paul Giamatti absolument époustouflant. Cette scène, pas si différente des autres en soi, est chargé de tension et conclut lentement cette acheminement attendu. Elle ne bouleverse pas par son contenu narratif mais par sa force de résonance. Finalement, on comprend que le lent processus d'évolution du film est nécessaire pour atteindre cette scène d'une force remarquable. Cosmopolis est loin d'être l'oeuvre qu'on attendait. Cosmopolis est loin d'être la réussite qu'on attendait. Mais c'est parce qu'il est loin de tout ce que l'on attendait de lui, qu'il va peut-être persister et laisser trace malgré tout, il en a le profil en tout cas.