Film puissant et remarquable. L'homme face à la nature et tout ce qu'elle a de plus hostile à offrir, l'instinct de survie et de fraternité face à un ennemi commun, la volonté chez l'homme de transcender les cadres et les institutions établies pour revenir à son stade le plus primitif, celui de tuer ou d'être tué.


L'immersion est quasi instantanée, la remarquable prestation de la flopée d'acteurs suscite chez le spectateur une empathie profonde envers leurs gestes et leurs décisions tout le long du film.


Le propos est facilement identifiable. Il s'agît ici de montrer, au sein d'un cadre qui exclut toute forme de juridiction et de loi, en quelque sorte une absence totale d'Etat et de ses composants, la nature humaine et le choc entre deux catégories d'individus socialement et culturellement opposées. Cette nature est universelle, propre à tout un chacun, et se déclenche dans une situation particulière, un contexte donné. Dans Délivrance, le but est simple : survivre. Véritable chasse à l'homme, le groupe d'amis parti pour une simple promenade en canoë, va se faire attaquer par des autochtones résidant dans les profondeurs des Appalaches.


Tous vont se serrer les coudes pour sortir de ce pétrin, fuir cette terre hostile. Leur véritable nature va se révéler, chacun va se dévoiler. L'expérience vécu par les quatre amis est une expérience quasi-similaire dans les zones de guerre (comme la guerre du Vietnam). Face à un ennemi commun, nuisible, on use de différents mécanismes, de différentes ruses pour en venir à bout, avec une absence totale de surveillance étatique. Nous pouvons donc tuer sans être punit. Dans ce genre de cas, la notion de droit naturel est remise en question, car plus rien n'est normé, plus rien ne régit les actions des individus, l'homme ne dispose plus de ses droits fondamentaux. Son véritable visage apparaît, il va se surpasser et s'étonner lui même, notamment par la quantité de violence qu'il peut générer contre l'un de ses propres congénères, pour défendre sa propre vie ou celle de ses camarades, dans un milieu qui lui donne tous les pouvoirs, dont le droit de vie ou de mort. Dans l'oeuvre de Boorman, le spectateur se sent directement concerné par la situation présentée à l'écran, et il se demande lui même comment il aurait réagit dans un tel cas de figure.


Délivrance est un film coup de poing. Boorman réalise là une oeuvre visuellement sublime, et nous rappelle à quel point la nature, bien que magnifique, est violente, en tout lieu, n'importe où sur la terre, par son absence de règles, de lois et de justice. Elle nous observe nous entredéchirer, encore et encore, inlassablement.

Intrepids
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le 27 févr. 2016

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Alexandre M2R

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