Depuis plusieurs années, il y a selon moi un réalisateur qui reflète parfaitement la déchéance des films d’action trop lisses et réalisés avec des moufles, c’est Olivier Megaton. Ce réalisateur qui à gagné en popularité en achevant le cadavre du Transporteur en 2008, enchaînant avec un Colombiana morne et risible pour finir par cracher ouvertement à la gueule de Pierre Morel quand il a pris la suite de Taken 2 l’an dernier. Pourtant le mec continue a sévir, tout simplement parce qu’il prend en général la suite de licences à succès que tout le monde, malgré une déception attendue, ira voir dans les salles. A la base réalisateur de clips, le mec est le client parfait pour ce qui est de se mettre à genoux devant la production, acceptant sans peine de réaliser des films vierges de violence trop prononcée, de sang ou d’insultes. Souvent réalisés sommairement, façon 24H Chrono, ses productions sont toutes plus mauvaises les unes que les autres.

Pourquoi avoir parlé de Megaton quand il s’agit ici de John Moore, réalisateur pas franchement fameux, qui a d’ailleurs en partie détruit Max Payne au cinéma ? Tout simplement parce qu’il me permettra d’étayer mes propos et ce symptôme dont la grande majorité des films d’action, et surtout les grosses licences sont victimes. Vu qu’il s’agit ici de Die Hard, je vais avant tout parler rétrospectivement. Le premier volet, appelé en France Piège de Cristal a été une sacrée révolution dans le genre du film d’action fin 80, début 90. On avait un personnage lambda, qui avait de la répartie et se retrouvait malgré lui pris dans un torrent d’emmerdes avec sa bite et son couteau, essayant de sauver sa peau et par la même occasion, celle des autres. Ça jouait beaucoup des flingues, il y avait du sang, de la sueur et de la testostérone qui suintait par tous les plans de la pellicule.

A lui seul Die Hard a engendré un nouveau style et il n’a pas fallu attendre longtemps pour qu’il devienne une licence juteuse pour la Fox et Bruce Willis qui s’est retrouvé au grand jour. Bon en, mal en, deux autres volets ont été réalisés durant la décennie 90 et la série s’est ensuite retrouvée en stand-by jusqu’en 2007. Durant toute cette période d’autres licences ont pu voir le jour, on peut signaler le précédemment cité Transporteur qui a lui, permis à Jason Statham de se faire un nom et dont EuropaCorp a bénéficié pour s’exporter aux Etats-Unis. N’oublions pas aussi la trilogie Jason Bourne qui à elle, carrément remanié le concept même du film d’espionnage moderne. On a aussi pu voir la trilogie Matrix, mais là c’est totalement différent malgré l’action constante dont font preuve les différents volets de la saga.

Que s’est-il donc passé pour qu’à une période, le genre action au cinéma se soie soudainement vu être remanié pour ne plus choquer ni surprendre ? Rien de bien spécial à vrai dire mais il est assez simple de voir à quel point au fil des années, la violence se retrouve souvent censurée, cachée de sorte à ne pas trop émouvoir les foules et permettre de manger à tous les râteliers (Le Transporteur 2 a été censuré pour un simple mec transpercé par un tuyau métallique).

D’un côté on vous expose des concepts de films d’horreur comme The Human Centipede et de l’autre on vous propose des films comme Colombiana où on trouve bien de l’action, beaucoup d’explosions et des cadavres en pagaille, mais jamais de sang ou de véritable violence. Des films souvent montés de manière archaïque, filmés en gros plans avec des mouvements très rapides afin de créer l’illusion d’un stress et d’un rythme incessant. J’en arrive donc à Die Hard 4, réalisé par Len Wiseman qui avait lui aussi crée sa licence d’action-fantastique avec Underworld. Relancer Die Hard après notamment le succès des Jason Bourne n’est pas une mince affaire, cela passait avant tout par un travail de modernisation et d’adaptation pour plaire à ce nouveau public aujourd’hui habitué à un rythme incessant plus qu’à des gerbes de sang. Il fallait aussi, et c’était primordial, garder les codes de la série : le fameux YIPEE-KAY, le côté huit-clos, l’humour de McLane et le côté vachard envers son adversaire. On s’était retrouvé avec un film agréable, bien plus moderne et avec quelques répliques bien senties. Par contre il y avait un clair souci au niveau des personnages parfois lourdingues et du méchant interprété par Timothy Oliphant, qui relevait plus de Christophe Lambert dans Beowulf que d’Alan Rickman dans Die Hard. Il y avait aussi, et c’est bien là son véritable souci, ce manque constant de violence pure. Préférant les effets pyrotechniques aux poches de sang, le film s’embourbait jusqu’à devenir ridicule en proposant au héros d’affronter un chasseur F35 à l’aide d’un 38 tonnes. En bref, Die Hard 4 était à la juste limite d’autant plus que Bruce Willis commençait à se faire vieux.

Die Hard 5 arrive donc après six ans d’absence. Des licences comme Taken on là aussi vu le jour, bien que massacrée ensuite par le second volet. La saga Bourne est revenue sur les écrans sans Matt Damon, ce qui s’est soldé par un échec assez cuisant, le film se retrouvant être aseptisé et mal écrit, ne proposant plus que de l’action débridée pour les kids. Ou encore le fantastique Total Recall, tellement mauvais qu’il faisait de la peine. On pouvait espérer un semblant de lucidité pour Die Hard 5 mais lorsque la bande annonce a été présentée, tout est parti en fumée. Déjà très mal écrit de base, le film n’a plus beaucoup d’espoir quand on réalise qu’il est question, comme dans tous les mauvais films d’action, de méchant russes qui cherchent à dominer le monde à l’aide d’armes nucléaires. Ici les codes disparaissent pour laisser place à un Bruce Willis qui cherche à retrouver son fils incarcéré à Moscou (vous noterez d’ailleurs aussi ce besoin incessant dans les grosses licences d’insérer un passé ou une sensibilité familiale au héros, Indiana Jones en a fait les frais). John Moore, parce qu’il faut bien revenir à lui, s’est probablement amusé comme un petit fou sur le plateau car il a tout fait péter. Tribunal, voitures, immeubles, hélicoptère… c’est simple, Die Hard 5 est un futur simulateur de technicien de surface. Le problème étant que tout exploser à l’écran n’a jamais fait un film d’action et que les directives données aux cadreurs sont : « bougez dans tous les sens, faites ça en une fois et en gros plan ».

Scénario risible et involontairement complexe, répliques qui tombent à l’eau, sidekick du fiston sans charisme, McLane se fait mener par le bout du nez parce qu’il est vacances. Willis montre clairement qu’il en a rien à foutre tandis qu’il se transforme en surhomme dès l’instant ou il conduit une voiture ou touche une arme de ses mains. Sa vulnérabilité est donc inexistante, celui-ci résistant même à l’atmosphère radioactive de Pripyat. Les efforts inexistants dans l’écriture font clairement de ce Die Hard le pire des épisodes et sûrement l’un des pires films d’action de ces dernières années. Poussant à son paroxysme le quota explosion, ne proposant jamais de véritable violence ou d’humour, il est le représentant même du film d’action des années 2000. Lissé, surfait et bourré d’effets spéciaux, il serait possible d’y emmener un enfant de 12 ans sans souci tant tout cela ne ressemble plus qu’à un ersatz de Call Of Duty au cinéma. Un film brouillon qui donne mal à la tête et qui arrive à vous endormir avec ses scènes d’action en slow-motion, plates et sans envergure, Willis se faisant doubler sur presque toute la fin du film.

Mais il démontre surtout un symptôme prépondérant dans les grandes licences d’action au cinéma, ou en tout cas apte à plaire au grand public : elles sont volontairement massacrées dans le but de s’ouvrir à toujours plus de monde. Ici la Fox est incapable de lâcher son ancienne poule aux œufs d’or afin de nous proposer quelque chose de neuf et de moderne, sans pour autant ressembler à tout ce qui se fait. Et le retour de bâton se fait sentir. Même si le film fonctionnera sûrement très bien au box office (finalement ce ne fut pas le cas), et plaira aux plus débiles, le spectateur, lui véritable amateur d’action se voit meurtri et floué. Les critiques sont sans équivoques et même si Die Hard 5 est un très mauvais film, il résulte surtout d’un ras le bol général et d’une constatation : il faut revenir à la base, proposer quelque chose de neuf, de frais et bordel, de jouissif. C’est plus possible de se retrouver aujourd’hui avec de l’action pour papys où même le sang est réalisé sur ordinateur, où les mecs se prennent des camions dans la gueule, sautent d’immeubles de 20 étages et se retrouvent sans une seule égratignure. Les grosses productions s’enchaînent et se ressemblent toutes, ne proposant même pas un sentiment de frisson ou de jubilation quand il s’agit d’abattre un grand méchant. Soit les studios et les créateurs se sortent les doigts du cul, soit on repart acheter des vieux films des années 80-90 qu’on se repassera en boucle en pleurant le bon vieux temps.

Note : critique initialement écrite à la sortie du film.
Florian_Bodin
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le 11 févr. 2015

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