Chapeauté par Peter Jackson, District 9 est un film qui connut un parcours fort contrarié. Initialement envisagé comme étant un long métrage prenant corps au sein de la mythologie Halo, série vidéo-ludique bien connue des joueurs et joueuses console, l'adaptation ne sera qu'un vain projet.
Pour diverses raisons, le projet fut abandonné. Cependant Neill Blomkamp et Peter Jackson ne laisserons pas leurs efforts et leurs idées partir en fumé. C'est ainsi que, sur ses braises encore chaudes, District 9 prendra forme.
Doté d'un budget humble et tourné en Afrique du Sud, District 9 nous conte l’arrivée impromptue d'un immense vaisseaux spatial renfermant en sont sein, son lot d’extraterrestres humanoïdes semblant perdus, affaiblis et bien hébétés d'être arrivé sur notre planète.
N'ayant pas de velléité à l'encontre de l'humanité, ni d'envie d'échanges particulier, le gouvernement Sud-Africain décide d’accueillir ces étranges visiteurs au sein d'un camp au relent de bidon-ville, le District 9.
Une trentaine d’années plus tard, le MNU (Multi-National-United) corporation privée est chargée par le gouvernement d'évacuer l’exponentielle population dans un autre camp, plus grand...
D'un point de vue strictement formelle, le métrage intrigue. S'ouvrant sur un patchwork d'extrait de journaux télévisé, entrecoupé d'interviews façon documentaire d'investigation, District 9 nous expose de façon très judicieuse, naturaliste et pertinente son scénario et ses protagonistes principaux. Sans pour autant tomber dans le "found footage" totale, le métrage prends, au bout d'un certain temps, une direction bien plus conventionnelle dans sa mise en forme. Ainsi, se resserrant sur un nombre réduit de protagonistes, la narration, presque intimiste, devient bien plus linéaire et plus cinématographique. Que ce soit un effet stylistique et/ou une habile manière de ne pas dépasser un budget modeste, le métrage se montre malin, rafraîchissant et judicieux dans sa structure.
De plus, les "E.T." de District 9 ne correspondent pas aux "affreux jojos" prédateurs que sont l'Alien de Ridley Scott ou les extraterrestres belliqueux d'Independance Day. Ils ne correspondent pas d 'avantage aux "êtres venus d'ailleurs" gentillets et sur-développés bien intentionnés du Steven Spielberg des années 70/80. Ainsi, les "crevettes"* sont d'avantages assimilés à des immigrants malgré eux, dont la présence et leurs multiplications, endémique sont devenus problématique pour leurs hôtes. Oui, pour une fois trop rare, les E.T. ne sont, ni des alliées, ni des antagonistes : ce sont des parias. Parias qui disposent toutefois d'une technologie potentiellement attractives aux yeux de La MNU mais, à leur grand dam, uniquement utilisables par leurs légitimes propriétaires.
Les effets spéciaux sont, quand à eux, tout autant aux services de l'intrigue, par leur grandes qualités. Malgré les prises de vue pouvant être assimilé à du "found footage" ces derniers sont très bien intégrés, et ne sonnent jamais faux. Malgré l'aspect anthropomorphique des aliens, ils jouissent d'un design suffisamment éloignées des stéréotypes habituellement usités pour apporter un vent de fraîcheur bienvenus au genre. Le dialecte leur étant attribué par l'équipe du film est également une excellente idée. (Celles et ceux qui sont rebuté de lire des sous-titres vont devoir se forcer ! ^^)
A cela, il faut noter l'exemplaire prestation de Sharlto Copley (Wikus van der Merwe). Jouant admirablement un être tantôt méprisable, tantôt "éthiquement récupérable", Wikus est éloigné du manichéisme inhérent aux protagonistes principaux proposé par le cinéma. Aux antipodes des stéréotypes hollywoodiens, Wikus tient moins du soldat sur-entrainé que de l'être humain lambda. Ainsi, Van de Merwe est falot, sans grande personnalité, voire raciste. Il est un protagoniste principal pour lequel les scénaristes ont joué très habillement de son ambiguïté morale. Elle sera l'interrogation majeur du spectateur, lui faisant, de ce fait, jouer agréablement à un "yoyo émotionnel" permanent. Plutôt appréciable lorsque la majorité des films de SF ambitieux techniquement, ne se contente que de faire du "ramdam visuel et sonore" pour éveiller et jouer sur les émotions du spectateur.
Car l'aspect "grand spectacle" n'est pour autant pas laissé de coté, ni décevant, loin, très loin de là !
Ainsi, les scènes d'actions, en plus d'être fort rondement menées et spectaculaires (déclenchant son lot d'adrénaline) restent lisibles en toutes circonstances, et ce malgré l'utilisation de caméra portée. Un bien fou à l'heure où l'art du "cadrage déconstruit et tremblant" est devenu tristement un effet de style en lui même...
Pour un premier long métrage, Neill Blomkamp livre un petit bijou, d'une force d'évocation exceptionnelle. Fin dans son intrigue et le traitement de ses protagonistes (humains comme non humains), il n'en oublie pas pour autant de divertir son public ainsi que de présenter moult références à la "pop culture".
Comme il est grisant que, dans le domaine du cinéma, tous les projets ne se déroulassent pas comme prévu, et comme il est appréciable que les braises ravivées d' "Halo : le film" débouchassent sur cette bouffée d'air frais revigorante qu'est District 9.
Pour autant, Neill Blomkamp confirmera t'il l'essai avec son second métrage, Elysium et son pitch ambitieux ? Suspense et boules de gommes. ^^
*Nom péjoratif donné par les humains aux extraterrestres.