Quand Alien rime avec Soweto
"District 9" s'avère être un étonnant et appréciable premier film du réalisateur sud-africain Neill Blomkamp. Alors que le cinéma nous confronte la plupart du temps à des aliens méchants et agressifs (style "La guerre des Mondes", "Independance Day", "Battle Los Angeles"...) ou alors gentils (genre "E.T.", "Rencontre du 3ème type") et en tout cas toujours dotés d'équipements et de ressources (par exemple "Men in Black"), voilà une variante ou les extraterrestres sont des parias venus comme des esclaves à bord d'un vaisseau en perdition.
L'idée n'est pas totalement neuve. Elle avait été abordée par Graham Baker en 1988 dans son "Futur immédiat, Los Angeles 1991". Mais alors que le film de Baker montrait des Aliens humanoïdes qui s'intégraient tant bien que mal en restant des méprisés (comme les Afro-américains des années 1950), "District 9" en fait des espèces de grosses écrevisses arrivées 20 ans plus tôt, qui sont parquées comme des animaux dans un ghetto d'Afrique du Sud. Ces êtres sont aussi devenus les victimes de gangs qui les rackettent afin d'essayer d'obtenir leur technologie et notamment leurs armes dont personne ne parvient à se servir.
Le scénario tourne quant à lui autour du personnage d'un administrateur travaillant pour une sorte d'ONU en charge de ces Aliens, qui se fait contaminer en voulant les déplacer vers un endroit plus éloigné, où ces êtres causeraient moins de problèmes. Le tout est filmé avec assez peu de moyens, mais pas mal d'imagination, notamment en "cinéma-réalité" avec des flashbacks sur l'histoire de ce fonctionnaire médiocre que le destin a fait basculer dans le camps des exclus.
Sur ces bases, le film est souvent drôle et touchant, parodiant tour à tour la mièvrerie sentimentale, le film d'action et le gore, tout en véhiculant un message sur la différence et sur l'exclusion qui ne laisse pas indifférent. Malheureusement, comme trop souvent, le scénario conserve des scories logiques. On se demande notamment pourquoi, alors que ces Aliens sont là depuis 20 ans, les hommes n'ont pas plus appris sur leurs technologies, ou pourquoi ils abandonnent à des gangs mafieux ces êtres dont ils pourraient tant apprendre... La fin laisse aussi un peu songeur et coince légèrement sur la cohérence, même si on se laisse prendre au jeu.