Le format d'un film oblige à livrer le récit en une seule fois et interdit les ressorts du feuilleton développant des intrigues complexes et maintenant l'envie de connaître la suite. Les auteurs de cette réalisation partaient avec un lourd handicap que les retrouvailles avec les visages connus des protagonistes ne suffisaient pas à remonter (chez les adeptes de la série). Œuvre doublement nostalgique : regret d'une série captivante reposant elle-même sur le souvenir d'une période fantasmée : le point de bascule entre l'apogée de l'Empire britannique et le début de son déclin vu depuis le cœur d'une vieille Angleterre aux clivages de classes surannés. Un point critique où le sucre romantique se dissout dans le vinaigre réactionnaire : ce qui donne le rôle clé de Lady Violet.
Si, vu de France, il est difficile d'évaluer la part de cette idéologie passéiste dans l'inspiration des Brexiters d'aujourd'hui, on ne peut s'empêcher d'y penser. D'une manière plus terre à terre, en s'informant un peu après le film, on apprend ce que sont devenus dans la réalité le château (de son vrai nom Highclere) et la dynastie (Carnavon et non Crawley) dont s'inspire directement la saga et on comprend le déclinisme qui enveloppe ce temps retrouvé. Le 8ème comte, né en 1956 et filleul de la reine, est devenu propriétaire du château en 2001, mais il vit dans un cottage à proximité du château dont le coût d'entretien est écrasant. Le bâtiment est attaqué par l'humidité et l'érosion ; en grande partie inhabitable, seul le rez-de-chaussée est loué pour des réceptions. Un avant-goût de l'Angleterre post-Bexit?