Tourné tôt le matin, la nuit et au crépuscule, le film baigne dans une tonalité froide qui renforce le caractère malaisant d'une narration trouble et anxiogène.


Isolés dans une maison elle-même reléguée en lisière d'un bourg inhospitaler, des prêtres vivent à l'écart du monde en compagnie d'une sœur faisant office de gouvernante et de geolière. L'église les a placés là pour qu'ils fassent pénitence mais aussi pour qu'ils échappent à la justice. On devine la pédophilie, la maltraitance, de sombres secrets, de sales besognes.


Le trouble grandit au cours d'une narration qui accompagne le quotidien de ces hommes et de cette femme ternes et désabusés. Ils possèdent un lévrier que l'un des prêtres entraîne régulièrement afin qu'il participe à des courses organisées dans le village, ces festivités constituant les seules sorties du groupe.


Si l'on comprend très vite que ces hommes ne sont pas des enfants de chœur, que la sœur elle-même semble avoir beaucoup à se reprocher, la manière dont le film les accompagne brouille sans cesse les repères et se refuse à tout jugement moral ou démonstratif. Quel qu'il soit, quels que soient ses crimes, un être humain reste un être humain.


En filigrane se profilent les démons de l'Église, sa capacité au silence et au déni, sa volonté de se soustraire aux lois des hommes. La mise en scène très maîtrisée de Pablo Larrain, les musiques de Bach et d'Arvo Pärt, l'alternance de paroles et de silences, le temps semblant souvent distordu, tout concoure à faire de El club un film inconfortable et singulier.

pierreAfeu
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le 17 mars 2016

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